Alan STIVELL – Parcours
(Pathé / Solidor)
À tout seigneur, tout honneur ! C’est à Alan STIVELL qu’est revenue la lourde tâche d’ouvrir la collection Horizons celtiques, dont l’idée est de présenter un artiste ou un groupe dans un coffret contenant un DVD et un CD, le tout dans un somptueux emballage avec de belles photos et une pochette qui attire le regard. Chaque DVD comprend une partie concert, une partie documentaire et une interview. Le CD quand à lui est une compilation ou figurent parfois des titres jusque-là inédits sur disques..
Quoi de plus logique que de commencer par celui sans qui cette collection justement n’existerait sans doute pas. Car il ne faut pas oublier que le musicien a été au début des années 1970 le catalyseur, celui grâce auquel la musique bretonne est sortie du simple cadre folklorique pour devenir une musique prompte à faire rêver ou danser la jeunesse, qu’elle soit bretonne ou non.
C’est par deux concerts que débute le programme du DVD. Le premier a été capté lors du Festival Interceltique 2001 à l’occasion de la tournée Back to Breizh, et le second est l’enregistrement du spectacle donné au Casino de Paris en 1994, lors de la tournée qui a suivi la sortie de Again, l’album qui a remis Alan en selle.
Le concert du Casino est le plus complet (18 titres), il dresse un panorama assez juste de ce que furent les grandes années STIVELL (période 1970-1975) en proposant bien sûr des versions réactualisées de ses succès. Cependant, il s’agit d’un enregistrement qui date un peu aujourd’hui et les qualités visuelles et surtout sonores présentent des faiblesses. Le concert de 2001 possède de bien meilleures qualités techniques, mais il est hélas un peu court (9 titres seulement) et se concentre surtout sur l’album Back to Breizh. Certains titres sont présents sur les deux concerts et permettent de constater l’évolution de la musique d’Alan entre les deux périodes. On retrouve ainsi Pop Plinn, Suite Sudarmoricaine (avec un mix entre sa version d’origine et sa libre adaptation en français dans le concert lorientais) et évidemment l’inusable et emblématique Tri Martolod (sur lequel Alan est accompagné au chant par Laurent VOULZY dans le concert parisien).
Il est par contre bien dommage que les tournées qui ont suivie la parution des albums Brian Boru (1995) et 1 Douar (1998) soient ignorées, car elles présentaient elles aussi des facettes différentes de l’artiste. Ensuite nous est proposé le documentaire Parcours. Il s’agit d’un film de Pierre DESGEORGES tourné pour la chaîne Arte dans la série Music Planet après la sortie de Brian Boru et déjà paru en DVD en 2000, mais qui est ici présenté dans une version écourtée. Alan nous conduit dans un voyage à la fois géographique et culturel. Il évoque son œuvre, qu’il a toujours voulue d’essence celte mais sans être pour autant figée. C’est ainsi qu’on peut le croiser en compagnie des Sœurs GOADEG, des CHIEFTAINS ou des DUBLINERS, mais également avec des groupes moins traditionnels comme les SIMPLE MINDS ou encore les Irlandais de THE FRAME.
Le programme suivant est une série de bonus qui vont du plus intéressant au plus anecdotique. On trouve donc un spot promo télé, un clip vidéo (Let the Plinn), trois titres en public enregistrés sur des scènes et à des époques différentes ainsi que deux trop courts reportages sur les coulisses des albums Brian Boru et 1 Douar. Mais le clou se trouve être une interview réalisée par le journaliste radio de France Bleue Armorique, Ronan MANUEL. En une vingtaine de minutes, Alan nous parle de sa démarche depuis ses débuts, évoque son amour pour la harpe et la langue bretonne, ainsi que son envie de continuer à faire avancer sa musique vers de nouvelles voies.
Le CD est une compilation non exhaustive (il a fallu faire des choix) qui ne reflète que partiellement la richesse discographique du harpiste. On retrouve bien sûr des incontournables, mais aussi quelques titres moins connus. La cerise sur le gâteau vient néanmoins des quatre derniers morceaux, inédits en CD, qui ont été enregistrés durant la tournée 2003/2004 et parmi lesquels on peut entendre une belle version chantée d’un grand standard, Eliz Iza, ou encore Slan, un « medley » où se croisent traditionnels et compositions et où Alan réussit à faire sonner sa harpe comme s’il s’agissait d’une guitare électrique. Le climat synthétique (forte présence de claviers) de la musique est une douce transition vers ce que fait aujourd’hui le musicien.
Ce coffret est donc un bon moyen pour faire connaissance avec Alan STIVELL. Il confirme en tout cas le talent d’un grand artiste.
Didier Le Goff
(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n°23 – mai 2006)