BLACKWATER – Dead & Breakfast
(Le Sonotone) //
DOOLIN’ – Popcorn Behaviour
(Keltia Musique)
La musique folk irlandaise est parfois produite par des groupes qui ne sont pas originaires pas de la Verte Erin. Si quelquefois, cela n’apporte pas grand-chose au modèle, il arrive malgré tout que le résultat sorte des sentiers battus et ne relève pas seulement de la simple anecdote. La France n’est bien sûr pas en reste et dans tout l’hexagone, nombreuses sont les formations que la musique irlandaise inspire. C’est le cas des deux groupes qui nous intéressent ici, à savoir BLACKWATER et DOOLIN’.
BLACKWATER est un combo originaire de Franche-Comté qui existe depuis maintenant sept ans. Dead & Breakfast (on notera ce subtil et effrayant jeu de mot) est son troisième album. Jusque-là, le groupe officiait sous la forme d’un quatuor instrumental, Gaël RUTKOWSKY (cornemuse irlandaise, flûtes), Sébastien LAGRANGE (accordéon), Didier GRIS (bouzouki, mandoline, violon) et Gilles SONNET (contrebasse, basse, saxo). Cet enregistrement marque un tournant et une évolution avec l’arrivée au chant de Jo MACERA et à la batterie de David ROUGEOT.
Musicalement, BLACKWATER évolue dans un style que l’on pourrait qualifier de folk country rock. La particularité du groupe est qu’il ne se contente pas de reprendre des titres traditionnels. La grande majorité des morceaux sont en effet des compositions originales.
Le ton est mis dès la première plage And You Know/What it Means, qui est une bonne entrée en matière, et dure jusqu’à l’avant dernier titre, Metalkid is Back, aux accents hard-rock prononcés. Le style est énergique, sans tomber dans la démonstration, et la cornemuse irlandaise est omniprésente, prenant parfois des airs de guitare électrique.
Les influences sont assumées et digérées (de Paddy KEENAN à Woody GUTHRIE). Le chant est à la hauteur, il faut le reconnaître, ce qui n’est pas toujours le cas dans ce genre d’entreprise. Quant au morceau qui clot l’album, il s’agit de Johnny’s Tune, une reprise à la cornemuse solo d’un titre de Paddy KEENAN, une des références du groupe. BLACKWATER se sort donc haut la main d’un exercice qui n’avait rien de facile au départ.
DOOLIN’ est le nom d’un village côtier situé dans l’ouest de l’Irlande. C’est désormais également le nom d’un groupe de la région toulousaine qui nous propose son premier album, Popcorn Behaviour (à noter qu’il existe en Suisse, un groupe homonyme pratiquant lui aussi de la musique irlandaise). Comparé à BLACKWATER, DOOLIN’ pratique une musique que l’on peut qualifier de plus traditionnelle.
La formation est également composé de six musiciens, Nicolas BESSE (guitares, banjo), Josselin FOURNEL (percussions), Guilhem CAVAILLE (violon), Jacob FOURNEL (flûtes), Wilfried BESSE (accordéon, chant, percussions) et Sébastien SAUNIE (basses). Tous ont diverses expériences liées à la musique irlandaise ou le folk (TRIO GAN AINM, THE GARTLONEY RATS, GADALZEN) et cela se ressent évidemment. On perçoit une maîtrise indéniable du sujet.
Le répertoire est un soigneux mélange de titres traditionnels (le plus connus étant As I Roved Out) et de morceaux originaux. Les titres, presque essentiellement instrumentaux, s’enchaînent naturellement et harmonieusement entre airs rythmés (les différents reels et jigs) et moments plus posés (Bonnie Blue Eyed Lassie).
Le seul reproche que l’on peut finalement faire à DOOLIN est qu’il ne se démarque peut-être pas suffisamment de ses inspirateurs et modèles. À vouloir trop bien faire, il y a une sorte de retenue qui fait que les musiciens ne se lâchent pas assez. Gageons que ce sera pour le prochain album.
BLACKWATER et DOOLIN’ sont donc la preuve qu’en matière de musique irlandaise, les groupes hexagonaux possèdent un savoir faire indéniable et n’ont rien à envier à leurs homologues irlandais. Dans des styles différents, ces deux formations contribuent à populariser cette musique et à en montrer toute son étendue.
Didier Le Goff
Sites : www.lesonotone.com/blackwater
(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n°31 – avril 2007)