Jacques PELLEN – Les Tombées de la nuit, A Celtic Procession Live

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Jacques PELLEN – Les Tombées de la nuit, A Celtic Procession Live
(Naïve)

De l’art d’ériger un instantané de vie exceptionnel en référence discographique fédératrice, voilà ce qu’illustre cet album. Et pourtant, ce n’est pas tant sous le nom CELTIC PROCESSION que ce concert du 10 juillet 1999 à Rennes a été donné, mais plutôt sous celui de Jacques PELLEN… « and Friends », comme on dit dans le milieu. Il s’agissait en fait de la soirée de clôture du 20e anniversaire du festival Les Tombées de la nuit, qui se devait d’être grandiose et de représenter la dynamique évolutive de ce renouveau musical celtique qui fait tant gloser… On a donc pensé à Jacques PELLEN, ce qui, ma foi, est plutôt une bonne idée !

Qu’on ne s’attende pas à écouter un album live classique, à la fois compilatoire et anthologique, de la fameuse CELTIC PROCESSION du guitariste breton. Mais ceux qui suivent ses travaux savent bien que la CELTIC PROCESSION est moins un groupe fixe qu’une formation à géométrie variable, laboratoire et moulin tout à la fois. Du reste, il n’y a eu avant ce live qu’un seul disque paru sous le nom CELTIC PROCESSION ; mais celui du trio TRYPTIQUE, celui du trio FRESU-PELLEN-MARCHAND ou du duo PELLEN-DEL FRA agissent comme autant de satellites de cette « entité processionnelle ».

Ce concert des Tombées de la nuit peut donc aussi se réclamer de la bannière CELTIC PROCESSION, ne serait-ce que parce qu’on y retrouve un bon paquet de musiciens qui ont participé à cette aventure qui a maintenant douze ans d’âge. Des anciens sont revenus, des petits nouveaux sont apparus et des « special guests », tel Dan AR BRAZ, ont été réquisitionnés pour concevoir un répertoire neuf, ou tout au moins des arrangements inédits.

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Si aucun morceau de Jacques PELLEN n’a été retenu (c’est quand même fort, ça !), on a cependant emprunté au répertoire d’AR RE YAOUANK (puisque Jean-Charles GUICHEN, Frédéric GUICHEN, David PASQUET et Stéphane DE VITO étaient de la partie), à celui de Dan AR BRAZ (le classique To Rory et le revenant Orgies Nocturnes, qui figurait sur Douar Nevez !), à celui de Soïg SIBERIL (grand absent de la soirée, parmi d’autres), à celui des BOCLE BROTHERS (juste en clin d’œil final) et bien sûr à celui de Kristen NOGUÈS, dont le somptueux Feunteun Wenn – dont on ne connaissait que la version harpe solo de son album An Evor – est ici l’objet d’un habillage collectif qui lui procure d’inattendus reliefs.

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Au total, c’est tout un pan de la création contemporaine bretonne qui est ici représenté de même qu’une bonne partie de ses acteurs les plus marquants (encore une fois, il en manque, mais on ne peut pas tout avoir…), Jacques PELLEN agissant moins comme « star du breizh-system » que comme maître alchimiste tentant de répartir et de doser les forces en présence de la façon la plus pertinente possible.

Sachant que, si notre homme n’est pas du genre à s’enfermer dans des balises stylistiques (fait-il du jazz ? du celtique ? Bon appétit avec ces tartes à la crème !), le festival pour lequel il jouait ce soir-là s’inscrit dans une logique de mise en valeur de la musique bretonne « ouverte », et non d’un « jazz ouvert ». Cela veut dire qu’à l’écoute de ce CD certains auditeurs déploreront le manque d’espaces de libertés solistes, alors que d’autres trouveront encore le moyen de dire que cette musique s’éloigne trop du « celtique ». Soupir…

Avec trop de monde ou pas assez de place, cette CELTIC PROCESSION fait l’effet d’un HÉRITAGE DES CELTES version avant-gardiste. De l’art aussi de couper, avec élégance, la poire en deux.

Stéphane Fougère

(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n°6 – juillet 2000)

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