Denis FRAJERMAN – Rivières de la nuit
(Douzième Lune)
Denis FRAJERMAN, qui a d’abord fait ses premiers pas de compositeur au sein du groupe expérimental français PALO ALTO, a toujours été passionné de littérature et d’oralité, collaborant régulièrement avec des conteurs et des écrivains lors d’émissions de France Culture. Compositeur de bandes-son pour des spectacles de danse contemporaine, de théâtre d’objet, des films d’animation, des courts métrages, des documentaires, il développe depuis quelques années en tant que guitariste une approche de cet instrument influencée par la musique folklorique grecque et le blues rural du sud des États-Unis.
Son haut fait d’arme restait jusqu’ici Les Suites Volodine, organisées autour des livres d’Antoine VOLODINE, avec il partage un goût prononcé pour les ambiances envoûtantes, l’humour noir et la sorcellerie. Mieux, FRAJERMAN et VOLODINE ont également collaboré à deux reprises pour créer Des Anges Mineurs, oratorio post-exotique pour un ensemble de 6 musiciens, cantatrice, narrateur, danseuse et vidéaste, et Vociférations, Cantopéra, pour 11 musiciens, commande des Ateliers de Création Radiophonique de France Culture.
Cependant, avec ce tout récent Rivières de la nuit, nous sommes désormais bien loin du « post-exotisme » exacerbé des Suites Volodine. Ceci fait place nette pour une musique raffinée et mélancolique, puisant tour à tour dans la musique contemporaine, la folk, la cold wave, le jazz ou encore la musique de chambre. Ces neuf pièces se révèlent mystérieuses et hantées, sinueuses et aériennes, en plus d’être rehaussées de cordes magnifiques et de voix féminines aux intonations magiques. Des images naissent dans notre tête. Des rêves ? Des souvenirs ? Ou des espoirs déçus ? Nous ne savons plus.
Rivières de la nuit est construit autour du livre homonyme de Xavier BOISSEL, écrivain né en 1967 à Lille. Redoutant un cataclysme planétaire, une Fondation a construit dans les glaciers d’une île, au Pôle Nord, une chambre cryogénique censée préserver la diversité des espèces végétales – environ cinq millions d’échantillons – peuplant la planète. Elle charge Elja Osberg d’en être la sentinelle. Très vite, une catastrophe climatique de grande ampleur survient. Elja Osberg comprend qu’il est le dernier homme.
À partir de ce récit riche et prenant, Denis FRAJERMAN, tisse sa musique avec art et méthode, méticulosité et sensibilité. On pense ici à COCTEAU TWINS, là à Béla BARTOK, ou encore à Bernard HERRMANN et à Michael NYMAN. C’est assez dire la très haute qualité de ce nouvel album et le plaisir qu’il procure à chaque nouvelle écoute.
Frédéric Gerchambeau
Site : http://denisfrajerman.com/
Label : https://denisfrajermanlabeldouzimelune.bandcamp.com/releases