Festival interceltique de Lorient 2025
Partie 1 : compte-rendu

Après une année 2024 marquée par une édition tardive en raison des Jeux Olympiques, les règles habituelles ont repris leur place. Le Festival Interceltique de Lorient (FIL) a donc démarré le premier vendredi d’août qui se trouvait aussi être cette année le 1er août, et il s’est terminé le dimanche 10.
L’an dernier, ce n’était pas une nation qui était mise en avant. Une autre thématique avait été choisie, la Jeunesse Celte. En 2025, on revient là aussi aux fondamentaux avec cela dit, non pas une seule nation à l’honneur mais un ensemble de nations, le Canada avec l’Acadie et le Québec, et les États-Unis, autrement dit les « Cousins d’Amérique ».
Cette année, en raison de travaux autour du Stade du Moustoir, le Breizh Stade et son Village Celte n’ont pas pu être montés. Mais un nouveau lieu a fait son apparition, sur le port de plaisance, côté Quai de Rohan, en face du Quai de la Bretagne, une Taverne Celte. On pouvait s’y restaurer tout en y écoutant de la musique.
Les scènes familières, l’Espace Jean-Pierre PICHARD, les pavillons des Nations Celtes et leur scène commune derrière le Palais des Congrès ainsi que le désormais indispensable Kleub, ont retrouvé leur emplacement et leur fonctionnement habituel. Le Théâtre étant en travaux, il n’a pas pu accueillir de spectacles.
Bénéficiant d’une météo très favorable et d’une programmation répondant aux attentes du public, le succès fut au rendez-vous. Les premiers chiffres annoncent une fréquentation autour de 950 000 festivaliers. En cumulant le nombre de tickets et de badges vendus, on atteint cette année le chiffre de 180 500 unités. Sur les dix jours, le badge donne accès aux scènes en extérieur situées entre le Quai de la Bretagne et les Place des Pays Celtes ainsi qu’au Kleub et au fest-noz de la Salle Carnot.
La Grande Parade des Nations Celtes a pu retrouver sa place le premier dimanche avec un parcours allant du Cours de Chazelle au Stade du Moustoir. Le défilé, toujours aussi plébiscité, a attiré au total plus 90 000 spectateurs entre les rues du centre-ville et l’intérieur du stade. Parmi les groupes les plus ovationnés, on peut citer le Bagad BRIEG, le Bagad de New-York ainsi que celui des pompiers du Morbihan.
En 2026, le FIL fera à nouveau une entorse à ses principes en ne démarrant pas le premier vendredi d’août. Il prendra en effet place du 31 juillet au 9 août, comme ce fut le cas d’ailleurs en 2009. Un focus sera bien dirigé vers une nation celte, la Cornouailles. Cependant, cela se fera autour du thème plus général de la Mer celtique. Cela nous promet une édition iodée.
Championnat des Bagadoù
Suite à des difficultés, SONERION, la fédération qui gère les bagadoù, n’a pas été en mesure d’organiser le concours de Lorient. Pour toutes les catégories, le Championnat des Bagadoù a en effet été mis en pause après la première manche qui s’est tenue durant l’hiver.
Cependant, le Stade du Moustoir a quand même résonné au son des cornemuses, bombardes et batteries le samedi 2 août. Un grand spectacle, le Trophée FIL Polig MONJARRET, s’est tenu dans l’enceinte sportive. Chaque bagad a joué le jeu et a présenté une suite musicale libre en respectant son identité. À cette occasion, c’est le public, et non un jury, qui votait pour désigner son champion.
Et… surprise, c’est le Bagad MÉLINERION de Vannes qui l’a emporté ! Un jury composé de professionnels et un public n’ont pas obligatoirement les mêmes critères d’appréciation et c’est aussi une bonne chose. Il est évidemment à espérer que toutes les manches du Championnat des Bagadoù 2026 puissent se tenir normalement.
ESPACE JEAN-PIERRE PICHARD
Le Chapiteau de l’Espace Jean-Pierre Pichard (ex-Espace Marine) a, comme à l’accoutumée, accueilli les grands concerts. Plusieurs soirées se sont jouées à guichets fermés et les autres ont connu une belle affluence.
Le Bagad de LANN-BIHOUÉ a été la première grosse tête d’affiche à se produire. Le célèbre ensemble venait présenter son spectacle Odyssée. Celui-ci avait déjà été programmé en 2022 et depuis, il a connu quelques modifications que le public lorientais a donc pu découvrir.
À désormais plus de quatre-vingt printemps, Alan STIVELL est toujours actif et sa venue au FIL est à chaque fois un évènement. En cette année 2025, il s’agissait de sa vingtième participation. L’artiste était attendu car le concert affichait complet depuis plusieurs semaines.
Le spectacle reprenait la trame de l’album en public Liberté-Roazhon paru fin 2024 dans lequel le barde et ses musiciens sont accompagnés de l’Orchestre National de Bretagne pour une re-visitation d’une partie de la Symphonie Celtique. L’orchestre n’était pas présent cette fois. Un ensemble de quatre violons était néanmoins venu en renfort.
Alan a attaqué d’emblée avec deux titres issus de l’album Live à Dublin de 1975, Spered Hollvedel en version chantée et le toujours très puissant Délivrance, puis il a enchaîné avec Cease Fire et Brian Boru. Une première partie de la Symphonie incitait à un certain recueillement. Alan n’était pas avare de commentaires et expliquait volontiers sa démarche depuis ses débuts, défendant un Interceltisme qui lui tient particulièrement à cœur.
Après-coup sont arrivés, dans une ambiance parfois très rock, les incontournables Son ar Chistr, Pop Plinn, le final de la symphonie Gouel Hollvedell ainsi que Kimiad et bien évidemment l’inusable Tri Martolod. C’est enfin sur l’hymne national breton, Bro Gozh ma Zadoù que le concert a pris fin. Manquaient par contre à l’appel d’autres classiques An Alarc’h, Brezhoneg Raok et la Suite Sudarmoricaine. Alan STIVELL a prouvé une fois encore qu’il restait incontournable.
Luz CASAL avait déjà été invitée en 2009. Beaucoup l’ignorent, mais la chanteuse est d’origine galicienne et a grandi dans les Asturies. Même si son œuvre peut sembler éloignée de la musique traditionnelle, elle peut s’y référer par moments. Luz est principalement connue pour avoir interprété le thème du film Talon aiguilles de Pedro ALMODOVAR. Cependant, et elle l’a prouvé, elle sait aussi se faire rock ou rendre hommage à DALIDA avec une interprétation poignante de Il venait d’avoir 18 ans.
Que cela soit lors d’années dédiées à l’Irlande ou non, les groupes ou artistes originaires de la verte Erin font toujours recette. Le succès de la Grande Soirée Irlando-Américaine était donc acquis d’avance d’autant plus que deux des formations les plus courues étaient au programme, LUNASA (Irlande) et SOLAS (USA).
LUNASA fait partie des habitués du FIL. Sa dernière prestation remontait à 2022. La précédente venue de SOLAS a eu lieu en 2016. Depuis, le groupe s’était mis en sommeil et puis il a décidé de revenir en 2025.
Les deux formations célébraient en plus cette année leurs trente ans. Ce n’était pas le seul point commun. Même si l’instrumentation diffère quelque peu, il y a une indéniable proximité musicale entre les deux groupes. Les voix sont cependant présentes chez SOLAS, ce qui n’est pas le cas chez LUNASA. Dans ce second cas, le guitariste Ed BOYD échangeait néanmoins aisément avec les spectateurs en français.
Il n’y a rien à redire non plus sur les qualités artistiques, sur la virtuosité des musiciens. Ces derniers savaient en plus doser leurs efforts afin de ne pas tomber dans la démonstration. Cela dit, si chacune des prestations était très agréables, elles n’affichaient aucune surprise. On se retrouvait quand même face à une expression classique de la musique irlandaise.
En fin de concert, LUNASA a rejoint SOLAS pour une session commune, communiant ainsi avec un public ayant obtenu ce qu’il était venu chercher.
LE VENT DU NORD est lui aussi un habitué du FIL, mais ses prestations se suivent et ne se ressemblent pas pour autant. En 2018, les musiciens et chanteurs québécois avaient joué un spectacle commun avec leurs compatriotes du groupe DE TEMPS ANTAN. En 2022, ils jouaient sous leur seul nom et cette année, ils revisitaient leur répertoire en compagnie de l’Orchestre National de Bretagne. Pour ce dernier, c’était aussi l’occasion de se frotter au folk québécois.
En 2009, LE VENT DU NORD avait déjà collaboré avec l’Orchestre Symphonique du Québec donnant ensuite naissance à un CD. Ce concert a donc pu servir de base à celui de Lorient. La rencontre entre les deux mondes pouvait sembler incongrue et pourtant cela fonctionnait. La musique des québécois est déjà colorée et l’apport de l’orchestre lui donnait de la puissance.
LE VENT DU NORD redevenait par moments un simple quintet et même parfois a capella, il ne manquait là encore pas de générosité. Les membres du groupe échangeaient naturellement avec le public, non sans humour, évoquant au passage un voisin américain particulier.
On pouvait s’étonner que cela ne se soit jamais produit et cette année des Cousins d’Amérique semblait enfin être le moment propice pour que Linda LEMAY soit enfin conviée au FIL. Certes, là aussi, on ne peut pas parler de musique celtique ; mais des touches de folk québécois parsèment malgré tout l’ensemble.
Sans fioritures, s’accompagnant à la guitare et soutenu par un pianiste et un violoniste, Linda a ravi le public autour de son répertoire pimenté de petites histoires du quotidien dans lesquelles chacun peut se retrouver, voire se reconnaître, à un moment ou un autre.
Le second week-end du FIL, les 8 et 9 août, l’Espace Jean-Pierre PICHARD a changé d’apparence en passant en configuration uniquement debout, permettant une jauge plus importante, pour deux soirées thématiques.
L’an dernier, un nouveau concept avait vu le jour, Bouge ton Celte !. Ce concept se voulait rock, voire punk-rock. Cela avait plutôt bien fonctionné et l’événement a donc été renouvelé en 2025 avec un succès indiscutable. Trois formations étaient au programme.
THE REAL MCKENZIES est un groupe de punk celtique originaire de Vancouver au Canada. Le groupe a démarré en 1992, mais il s’agissait de sa première participation au FIL. Il n’est pas très connu de ce côté-ci de l’Atlantique, mais après sa prestation lorientaise tout en sueur et en testostérones, il y a fort à parier que la donne va changer.
L’autre groupe punk celtique présent ce soir-là vient de la région lyonnaise, ce sont les filles de TOXIC FROGS. On pouvait les croiser dans le Off il y a une dizaine d’années. Elles effectuaient avec un grand plaisir leur retour à Lorient, qui plus est dans la programmation officielle et sur la plus grande scène.
Après ce déluge de guitares, de décibels et de quelques revendications bien envoyées, ce fut au tour des RED HOT CHILLI PIPERS de poursuivre et de terminer la soirée. Le combo écossais effectuait lui aussi son retour au FIL. On se retrouvait là dans une atmosphère rock celtique plus conventionnelle. Si la guitare électrique était bien présente, les cornemuses n’étaient pas en reste.
Sur la même idée, le samedi 9 août a été initiée une soirée nommée ElectroFil. Il y avait déjà eu une tentative similaire en 2019 lors d’une représentation baptisée à l’époque Celtic Electro +.
C’est au groupe québécois MÉLISANDE qu’incombait la lourde tâche de lancer les hostilités devant un parterre hélas plutôt clairsemé. Les musiciens et la chanteuse ne ménageaient pas leurs efforts pour convaincre l’assistance. MELISANDE définit son œuvre d’électro-trad, et il faut reconnaître que ce qualificatif était plutôt approprié. Les programmations électro étaient associées à une batterie et le violon, apportaient des sonorités plus folk. On croisait parfois au passage des chansons connues (Au chant de l’alouette).
TEKMAO est un trio breton (cornemuse, bombarde, machines). On se retrouvait là dans une ambiance entre fest-noz et rave party, entre trad et trans.
Deux autres formations, cette fois sans rapport avec la musique traditionnelle, ont complété l’affiche, SUBMARINE PROJECT un trio lorientais et YARD, un groupe irlandais aux influences diverses (rock, punk et techno).
La jauge s’étant remplie au fur et à mesure de l’avancement du spectacle, le Directeur Artistique du FIL a reconnu que le public électro débutait ses soirées plus tard et l’heure de démarrage n’était sans doute pas adaptée.
Ces deux représentations devraient en tout logique être reconduites en 2026.
LE KLEUB
Le chapiteau du Kleub, place de l’Hôtel de ville, fait aujourd’hui partie du paysage lorientais durant les dix jours du Festival. Il est accessible avec le badge de soutien et rencontre tous les soirs une affluence considérable.
La scène est définie comme étant dévouée aux musiques celtiques actuelles ou apparentées et des artistes aux références variées (rock, électro ou encore folk) s’y sont produits.
On a pu y croiser des habitués, aux sonorités plutôt modernes tels que PLANTEC, STARTIJENN ou RED CARDELL.
Dans un registre plus folk, on a remarqué les prestations des Asturiens d’ALIENDA et des Écossais de TALISK.
Parmi les découvertes, on notera les Acadiens d’ABOITEAU et leur folk-rock celtique aux belles envolées de violon, ou encore SCOTTISH FISH, cinq filles originaires de Boston, alliant les cordes de quatre violons à celles d’un violoncelle ou d’un piano.
À la croisée des genres, pop-folk teintées d’influences rock ou électros, Brieg GUERVENO est venu présenter son nouvel album, toujours entièrement chanté en breton, qui bénéficie d’un très bon accueil.
Didier Le Goff
Un grand merci à l’agence de communication HEYMAN ASSOCIÉS
et en particulier à Sarah, Victoria, Erin et Marie-Anaïs,
ainsi qu’à Aude, Marjorie et Jérôme, bénévoles au Service Presse.
Site du Festival : https://www.festival-interceltique.bzh

