Mariana CAETANO – Mé ô Mond
(Madame Bobage/Coop Breizh)
Que devient la chanson brésilienne ? Pour beaucoup d’entre nous, qui avons été accompagnés par les rythmes syncopés du Brésil dans notre enfance, puis notre adolescence, pour souvent en devenir « accros » dans notre jeunesse, elle appartient à une époque révolue, d’avant la segmentation marketing de la musique, considérée, depuis les années 80, comme un produit.
Et bien, c’est entièrement faux ! L’industrie du disque n’a pas eu raison des talents émergeant au troisième millénaire – rock, jazz, musiques du monde… – , même si elle a porté de sérieux coups de massue aux initiatives singulières et originales.
Et l’on peut encore découvrir de superbes œuvres, grâce au disque – à condition de sortir des sentiers battus et de lorgner vers les labels indépendants.
Preuve en est donnée par ce deuxième album de Mariana CAETANO réalisé et produit en Bretagne par Madame Bobage (en la personne de Matthieu BAUDET) et distribué par une société bretonne de référence : Coop Breizh.
Les onze titres de Mé ô Mond laissent découvrir la liberté et le soin avec lesquels notre auteure-compositrice a pu enregistrer, dans les Côtes d’Armor, grâce à l’équipe-son composée de Glenn BESNARD, Jérémy ROUALT et Marco MIGLIARI.
Chacune de ces historiettes bénéficie d’un climat sonore spécifique, dû à la variété des instruments utilisés. Les riches et très colorés arrangements de Joachim BLANCHET, lui-même aux claviers – très présents ici – , contribuent à rendre cet opus mémorable, de même que les effets choisis, jalonnant ce disque. Ainsi, grâce à ces derniers, peut-on encore mieux se rappeler chaque chanson par rapport aux autres.
Les autres musiciens qui constituent cette formation de studio donnent à entendre leur art du jeu par la subtilité de leur prestation. Le batteur Federico CLIMOVICH est à l’aise sur toutes les combinaisons rythmiques (y compris les plus complexes), Xavier SOULABAIL souligne la rythmique de sa basse experte et Stéphane KERIHUEL intervient discrètement et efficacement aux guitares électriques (avec ou sans effets) et acoustiques.
Pour notre plus grand plaisir, ils sont accompagnés par Benoît GAUDICHE à la trompette, Olivier Le MARCHAND au trombone, Matthieu LETOURNEL au tuba, Marcelo COSTA aux percussions. Si l’on écoute attentivement les petites pièces exquises produites par tous ces artistes, les textes et la musique de Mariana CAETANO sont particulièrement bien mis en valeur.
Sur ces arrangements qui n’ont rien de typiquement brésiliens mais qui empruntent à un répertoire cosmopolite aux multiples influences, se pose la voix parfaitement libre (car étudiée et travaillée) de cette jeune femme au talent affirmé et au timbre immédiatement identifiable. Ainsi d’un bout à l’autre de ce disque, Mariana CAETANO peut miauler ses textes, les déclamer en rythme, laisser traîner sa voix à côté de la tonalité – comme jadis Léonard COHEN dans ses premières chansons –, ou décider de les chanter d’une voix aiguë, ou sensuelle ou encore forte et ouverte, l’auditeur d’un extrait radiophonique saura immédiatement de qui il s’agit.
Et pour qui comprend le portugais du Brésil (neuf chansons sur onze), l’esprit d’indépendance dans les vers composés parlera d’autant mieux à cet auditeur ; pour les non-lusophones, les deux chansons en français l’initieront au monde chanté par cette auteure fixée en Bretagne et d’esprit international.
Lorsque se fond la dernière note de Mé ô Mond, nous n’avons qu’un regret : que ce disque ne soit pas plus long d’un bon quart d’heure, nous offrant plus encore de ces succulentes surprises musicales.
Bravo donc à Mariana CAETANO et à toute l’équipe qui a collaboré à ce disque !
En France, la relève de la chanson brésilienne est assurée !
Site internet : https://www.facebook.com/mariana.caetano
Mescalito