MORAINE – manifest deNsity

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MORAINE – manifest deNsity
(Moonjune Records)

MORAINE sort son premier album sur le label Moonjune (un nom évidemment en référence au thème Moon In June de SOFT MACHINE). Il s’agit d’un acte de naissance en matière discographique mais, à l’instar de l’être humain dont les neuf mois de gestation ne sont pas décomptés en temps de vie, MORAINE est beaucoup plus âgé qu’il y paraît.

Sans remonter à des âges antédiluviens (une moraine étant formée de débris de roches déplacés par un glacier…) les débuts d’un de ses membres, le guitariste Dennis REA, nous replonge à la fin des seventies, lorsqu’il participa à EARTHSTAR, groupe cosmique basé dans l’Ohio qui fut suffisamment influencé par la vague planante allemande pour être signé par l’un de ses labels phares : le mythique Sky Records. Dennis REA participa aussi pendant de nombreuses années au groupe multi-directionnel LAND mené par Jeff GREINKE et à divers projets d’Eric APOE. Plus près de nous on retrouve Dennis REA en 2003 sur  Strong Currents d’Hector ZAZOU.

Malgré le pedigree, Dennis REA n’est pas à proprement parler le leader de MORAINE, même s’il signe la moitié des compositions de manifest deNsity. La musique jouée est très collective, laissant une large place aux soli et à l’improvisation. Si l’on s’en tient à l’instrumentation (violon, violoncelle, guitare basse, guitare, batterie) on est en présence d’un quatuor à cordes augmenté d’une batterie. Et MORAINE sonne effectivement comme un petit ensemble à cordes (électrifiées) évoquant un peu les formations affiliées aux nébuleuses Zeuhl ou Rock in Opposition, entre ART ZOYD et ZAO pour laisser le champ aussi ouvert que l’alphabet latin le permet.

Les morceaux se mettent en effet en place par la réitération collective d’un thème court aux ruptures sèches et à l’exécution un peu mécanique. Puis les instrumentistes brodent des variations, des soli se greffent naturellement, notamment ceux à la guitare de Dennis REA qui surplombent souvent magnifiquement l’ensemble, bien que parfois à la limite de la démonstration de virtuosité. Certains passages évoquent KING CRIMSON ou encore une certaine forme de jazz-fusion.

Le matériau thématique est très riche à tel point qu’il est un peu épuisant pour l’auditeur. Ce dernier est alors en droit de se demander pourquoi l’album est composé de onze titres de quatre à six minutes chacun. Pour respecter les canons en vigueur ? Pourquoi ne pas se laisser tenter par la forme de la « symphonie progressive » en trois ou quatre mouvements ? Cette structure ménagerait quelques phases d’exploration plus étendues et détendues, car MORAINE propose sur manifest deNsity une excellente nourriture pour les ouïes, mais si riche qu’elle se digère difficilement.  

Sites : https://moraine.band/

www.dennisrea.com

Label : www.moonjune.com

Eric Deshayes

(Chronique originale publiée dans TRAVERSES n°28 – mai 2010)

 

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