RIALZU – U Rigiru

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RIALZU – U Rigiru
(Soleil Zeuhl)

RIALZU en langue corse, veut dire « renaissance ». Ce nom est bien porté par ce CD, réédition d’un disque sorti en Corse uniquement en 1978, à 1000 exemplaires, mystérieux (aucune information sur la pochette à part le nom du groupe) et longtemps introuvable. Nous savions qu’il existait grâce à la Discographie alphabétique du rock français de Francis GROSSE et Bernard GUEFFIER (notre bible à tous) dont la description détaillée donnait envie : « le chant grave en corse s’élève (sur le thème principal) et instaure un climat solennel, chargé d’émotion et de tension. Ce chant est relayé par des chœurs masculins et féminins amples et sombres. La face B est introduite par le souffle angoissant du vent, auquel est enchaîné une lente et sourde montée des chœurs imprégnés de cette ferveur, de cette tristesse ténébreuse des chants corses ».

Soleil Zeuhl a mis au jour ces enregistrements qui nous permettent de confirmer que le frisson parcourt l’échine lorsqu’on appuie sur « play ». Ce disque mythique a été enregistré en un jour, le 3 mai 1978 sur un studio 8 pistes par des musiciens amateurs qui découvraient les techniques du studio ! Autant dire que c’est un miracle ! La musique est bien de la zeuhl : l’introduction du premier morceau U Rigiru fait une référence explicite au glorieux riff rythmique magmaïen, la langue corse, si elle n’est pas du kobaïen sonne inhabituellement aux oreilles d’autant qu’elle est chantée par ces voix graves et solennelles – impressionnantes ! – les chœurs font écho à ESKATON.

Certes, il n’y a pas véritablement de transe mais un fond de rock progressif mâtiné de jazz-rock où l’orgue le dispute au violon, et le Fender s’envole dans des impro, suivi de la guitare électrique. Le disque original est court (une trentaine de minutes) et le CD est complété de deux bonus live de morceaux inédits et d’une petite piste vidéo ! Que de surprises !

U Rigiru s’ouvre sur une introduction corsée (jeu de mots !) où le groupe entier joue le thème et improvise dessus. Un break arrive, laissant échapper une nappe calme, ponctué de pizzicato et de notes répétitives jouées au piano et à la basse. Le moment est venu de la voix masculine contant une légende corse, rejoint par une voix évanescente puis une lente montée en tension avec les chœurs. La batterie scande (et nous avec) pendant qu’un synthé fait son solo. Un passage étonnant, uniquement de la batterie, pendant plusieurs minutes, termine sur la reprise du thème par les chœurs.

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I Lagramenti alterne les moments sombres marqués par le chant masculin et les vocalises féminines, et les moments plus exaltés, menés par les solos de guitare électrique ou de violon. Le vent et les voix introduisent et concluent dans une ambiance fantomatique.

A Mubba est un court morceau dynamique qui permit, à l’époque, de terminer le disque.

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U Sterpamondu est le premier bonus. Une grande valeur malgré l’enregistrement médiocre. Mais un vrai morceau de rock progressif (VDGG) corse, au violon incisif et à la rythmique imperturbable et inventive. Et toujours, les voix. Un duo masculin/féminin majestueux. Un orgue planant et un violon solo digne d’AMON DUUL II introduisent un nouveau passage de batterie seule qui, à l’instar de U Rigiru dont il est proche, termine au bout de 13’ sur la reprise du thème avec basse obsédante et duo de voix aérien.

A Man di Diu est le second bonus. Plus ancien (enregistré live en 1976) et plus court (5’), il ne jure pas avec le reste de l’album même si l’atmosphère est différente : pas de rythmique, chœurs masculins sombres et majestueux sur orgue d’église (cf. le titre Les Bontés divines).

La piste vidéo de 1’42 permet de voir le groupe sur scène. Cerise sur le gâteau. C’est court mais on « voit » la puissance de la voix !

Un livret de 16 pages contant l’histoire du groupe et du disque, avec photos complète l’ensemble. Indispensable.

Frédéric Vion

Page label : http://www.soleilzeuhl.com/

(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°27 – décembre 2009)

NDLR : Une réédition vinyle de U Rigiru, comportant les deux bonus de la version CD, est parue en 2022 sur le label allemand PQR (PlusQueRéel).

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