Sangam : Michael NYMAN meets Indian Masters U.SHRINIVAS and Rajan & Sajan MISRA

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Sangam : Michael NYMAN meets Indian Masters U.SHRINIVAS and Rajan & Sajan MISRA
(Warner Classics)

Cela a commencé par un voyage en Inde durant l’année 2000, pendant lequel Michael NYMAN, qui n’avait qu’une connaissance livresque de la musique indienne, l’a expérimenté en live et, de discussions en écoutes, a fini par élaborer un projet de rencontre artistique sous forme de deux collaborations : l’une avec le talentueux U. SHRINIVAS, qui a introduit la mandoline dans la musique carnatique (d’Inde du Sud) et l’autre avec l’impressionnant duo vocal de Bénarès Rajan et Sajan MISRA, hautes pointures du chant “khyal” et dévotionnel hindoustani. On ne peut qu’applaudir ce choix…

Le compositeur contemporain anglais avait déjà eu l’occasion de travailler sur les systèmes rythmiques indiens dans le cadre de son String Quartet n° 2, mais c’est la première fois qu’il travaille de visu avec de grands maîtres de la musique indienne. Cette rencontre, ou plutôt ce point de rencontre (sens du terme « sangam ») entre la musique savante indienne et la musique contemporaine occidentale, NYMAN l’a éprouvé sous deux aspects bien contrastés et entremêlés, la collusion et la collision. Il était en effet soucieux de ne pas procéder à une forme de pillage touristique mais au contraire de créer un contexte où les deux mondes pourraient dialoguer.

La première composition, Three Ways of Describing Rain, voit le MICHAEL NYMAN BAND soutenir avec beaucoup de légèreté et de discrétion le chant éthéré et millénaire des frères MISRA, aucunement inquiétés par cette cohabitation avec seize musiciens d’un autre monde. Possédées par la béatitude, les cordes occidentales flottent autour du noyau de ferveur généré par les MISRA, qui va crescendo jusque dans la troisième partie, Dhyan, où les tablas de Sanju SAHAI et la mandoline de SHRINIVAS sont conviés à partager cette atmosphère de méditation. C’est manifestement avec des pincettes que NYMAN appréhende cette collaboration, et il s’est borné à mettre en perspective le caractère recueilli et velouté du chant khyal sans chercher à s’imposer. La déférence est de rigueur face à tant de plénitude spirituelle.

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Il en va tout autrement avec Samitha (Compiling The Colors), la composition conçue avec U. SHRINIVAS. Lui n’en est pas à son coup d’essai en matière de fusion musicale (il n’est que de rappeler ses travaux avec Michael BROOK – le superbe album Dream, sur Real World – et bien sûr avec John Mc LAUGHLIN au sein de REMEMBER SHAKTI), et c’est avec un aplomb désarmant qu’il improvise dans les grandes largeurs sur ce qui était au début un simple riff pentatonique de NYMAN.

La pièce s’est ainsi développée en de multiples directions pour atteindre cette confortable durée d’une demi-heure que l’on ne voit quasiment pas passer, tant elle est animée d’une pétulance mélodique subjuguante, traversée de pluies de notes et d’éclairs rythmiques qui diffusent un enthousiasme revigorant. SHRINIVAS s’est bien vite imposé comme co-compositeur de ce qui a pris la forme d’un « concerto pour mandoline », au point que NYMAN reconnaît qu’il est devenu difficile de distinguer quelle partie a été écrite par qui…

Au-delà de ses accents un peu polis, Sangam célèbre une rencontre génératrice de climats aussi opposés qu’intenses qui ne peuvent qu’emporter l’adhésion de l’auditeur.

Stéphane Fougère

(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n°13 – septembre 2003)

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