WINGFIELD, REUTER, SIRKIS – Lighthouse
(Moonjune Records)
Lighthouse est l’album-jumeau de The Stone House, déjà sorti et surtout déjà mondialement acclamé. Mais au-delà de cela, si The Stone House ressemblait à un mystère musical, Lighthouse à toutes les apparences d’une énigme stylistique. Est-ce du rock, à cause de sa force ? Est-ce du jazz, à cause de ses longues improvisations ? Est-ce le futur des deux, à cause de la nouveauté radicale des chemins harmoniques empruntés ? On ne saurait trop dire. Ce qu’on peut dire en revanche, c’est que les deux albums sont issus d’un marathon de six jours d’interminables sessions d’enregistrements. Une fois épurées, cela a donné ces deux diamants bruts d’un style indéfinissable, insondable.
Il faut avouer aussi qu’avec les trois pères qui ont donné ces deux albums aussi resplendissants qu’étranges, on aurait difficilement pu s’attendre à autre chose. Il y a d’abord Mark WINGFIELD, une sorte de guitar-hero au jeu indifféremment rock, jazz ou classique aussi débridé que passionnant ayant officié pour pas moins que Peter GABRIEL, TRICKY, Todd RUNDGREN et Dave STEWART.
Il y a ensuite l’homme couteau-suisse Markus REUTER, musicien, compositeur, producteur mais aussi concepteur d’instruments et dont la particularité, si cela ne le distinguait pas encore assez, est d’être un expert de la Touch Guitar. Et pour compléter ce duo déjà détonant, il y a encore l’incroyable batteur qu’est Asaf SIRKIS.
Inutile de dire que quand trois musiciens de cette envergure entrent dans un studio et y restent six jours, ce n’est pas pour qu’il en résulte du banal et du gnan-gnan. D’un autre côté, la musique littéralement stratosphérique du trio exige une qualité d’écoute bien au-dessus de la normale, d’autant plus que deux des titres de l’album dépassent de loin les dix minutes. Comprendre qu’il faut souvent s’accrocher pour ne pas être largué au beau milieu d’un solo labyrinthique. Mais qu’il soit dit également que cet effort est le prix du plaisir ressenti.
Les arcanes de la musique de ce fabuleux trio ne se dévoilent pas comme ça, elles se méritent. C’est comme escalader l’Himalaya note après note, cela donne le tournis, le vertige. Mais le voyage harmonique est si intense, quoique frôlant toujours le bord d’invisibles précipices. Oui, Lighthouse est une aventure tumultueuse, une odyssée pleine de surprises.
Et pour tout vous avouer, il y a même une dimension mystique dans cet album, celui-ci ayant été enregistré dans un studio bâti tout exprès dans la Casa Murada, à Banyeres del Penedes, en Catalogne, un manoir d’une splendeur magique datant du XIe siècle. Prêt pour une inoubliable virée dans l’inconnu ?
Frédéric Gerchambeau
Site : www.markwingfield.com
Label : www.moonjune.com