Compagnie MONTANARO – La Polonaise
(Le Roseau)
Difficile de décrire d’emblée La Polonaise, création de la Cie MONTANARO produite par Gabriel YACOUB. Est-ce un album, un poème chanté, un état d’âme et d’amour conceptualisé ou un rêve mis en musique ? C’est sûrement un peu tout cela en même temps. Et il faut aussi parler des poèmes visuels qui accompagnent sous forme de DVD les quinze titres du CD.
Ce dernier est écouté en 33 minutes et 34 secondes. C’est fugace, mais c’est ensuite tenace au souvenir. Les airs, l’histoire et les images induites restent imprimés au creux de la mémoire. Dans la durée et dans le concept, cela peut rappeler L’Histoire de Melody Nelson du regretté Serge GAINSBOURG. Toutefois, la comparaison s’arrête là. Car l’atmosphère de La Polonaise a sa nature propre, faite d’onirisme, de sentiments retenus et d’envolées de mots.
Nous sommes en Pologne, à Katowice, c’est un train qui nous a emmené là-bas, très loin vers l’est, dans le pays où habite l’hiver. Nous sommes un homme de quarante ans. Elle, la Polonaise, n’en a que vingt. Elle s’appelle Magdalena, elle est belle, elle nous aime, elle nous a écrit, c’étaient des phrases si tendres, nous sommes là, elle se donne. Notre cœur bat, c’est trop beau, c’est trop fort. Cela ne dure qu’une nuit, une seule, mais inoubliable. Et pour toujours Magdalena restera La Polonaise.
J’ai résumé. Très mal. Il faut la musique, la langue et l’accent de Miquèu MONTANARO, la voix de Sylvie BERGER, les arrangements de Yannick HARDOUIN, l’accordéon de François HEIM, les tubas de Daniel MALAVERGNE et la clarinette de Frédéric PARIS. Alors seulement le rêve se tisse pour le plaisir de nos oreilles et de notre imaginaire.
Et comme à chaque fois Miquèu MONTANARO nous emmène dans un voyage musical improbable, réinventant la chanson traditionnelle pour mieux nous replonger dans ses racines originelles, transfigurant sa sensibilité d’Occitan pour toucher à l’universel. C’est beau, c’est pur et surtout c’est fait dans la marque de la plus grande authenticité. La nostalgie qui nous étreint n’est pas feinte. Elle émane à chaque instant de notre passé commun, chacun ayant vécu la même histoire, le croisement et le frôlement de deux cœurs avant une séparation définitive toute aussi soudaine. Amour en miettes, âmes esseulées, éclats de souvenirs et pour finir l’impossible oubli.
Gabriel YACOUB a parfaitement mis en scène ce récit éternellement rejoué par d’anonymes amants de par le monde et l’histoire. Discret dans les chœurs, il se révèle plus dans ses paysages sonores. Mais il souffle surtout un esprit de qualité et même d’exigence.
Quant à la partie DVD de La Polonaise, elle est signée György LASZLO. Ses films, illustrant chaque titre de l’album, sont autant de dentelles cinématographiques faites d’images éthérées et de visions sublimées.
Frédéric Gerchambeau
Album CD + DVD disponible ici : http://www.gabrielyacoub.com/boutique/index.php
Site : www.compagnie-montanaro.com
(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n°38 – Printemps 2008)