FAMILHA ARTÚS
Le Son du Cosmotrad’ Inferno
Originaires de la région de Pau, les membres de la FAMILHA ARTÚS se font forts de pratiquer une « musique radicale de Gascogne » qui combine la rusticité acoustique d’une vielle à roue, d’un tambourin à cordes, d’une cornemuse, d’une guimbarde ou d’un chant trad’ avec des sons plus modernes, électro-acoustiques, qui puisent éhontément dans le psychédélique, le drum n’bass, les musiques progressives, le trip-hop ou encore le rock alternatif. Balançant dans le même bain grincements ruraux et saturations urbaines, ils ont généré un univers à nul autre pareil, baptisé « cosmotrad' », qui se distingue par son processus évolutif perpétuel.
Depuis la sortie de son second album, Òrb, le groupe a encore renouvelé son approche sonore, ne cessant d’affiner son engagement (« Nous jouons ce que nous sommes ») dans une optique qui renvoie dos à dos à leurs réifications conceptuelles les puristes des milieux traditionnels comme ceux des microcosmes prog’.
Aujourd’hui, la FAMILHA ARTÚS se compose de cinq musiciens (+ deux techniciens) : Pairbon (Roman COLAUTTI) aux guitare basse, guitare baritone et percussions ; Romain BAUDOIN à la vielle alto (tous deux issus du groupe avant-gardiste progressif ZAAR) ; Matèu BAUDOIN au chant et aux guitare basse, tambourin à cordes, flûtes, et percussions ; Tomàs BAUDOIN au chant et aux guimbardes, cornemuse landaise (boha), flûtes et percussions ; et Shape2 (Nicolas GODIN) aux dispositifs électroacoustiques et percussions. Pour les lecteurs de TRAVERSES / RYTHMES CROISÉS, ils font le point sur l’évolution de leur parcours à travers les chemins de terre folk et les sous-sols avant-gardistes.
Entretien avec FAMILHA ARTÚS
Il y a une évolution assez sensible de la musique de FAMILHA ARTÚS du premier à votre second album. Comment s’est fait le choix de mettre en avant certaines directions ?
Romain : L’évolution est due à notre travail. FAMILHA ARTÚS n’a pas été créé avec une idée bien précise au départ. Le groupe évolue lentement au gré de nos capacités artistiques, de nos capacités techniques et de notre volonté. Actuellement, nous écoutons tous beaucoup de rock alternatif, donc la musique tourne plus sur du rock.
Le premier album est beaucoup plus acoustique, avec des constructions peut-être plus complexes par moments, mais une musique moins engagée, plus consensuelle, même s’il y avait déjà les grandes trames. De temps en temps on réécoute ce qu’on fait et on se dit « tiens, on en est là ».
Nous travaillons donc énormément et nous répétons beaucoup. FAMILHA ARTÚS n’est pas qu’un projet parmi d’autres, c’est NOTRE projet. Depuis maintenant deux ou trois ans, nous ne faisons tous que ça, et forcément le groupe prend une autre dimension, une autre dynamique.
Investissement total pour évolution radicale
Contrairement à l’époque où vous étiez chacun impliqués dans d’autre projets. Il y a donc eu un recentrage ?
Romain : Oui. Il y a eu un recentrage obligatoire, parce qu’à un moment donné si tu veux passer des caps dans ce genre de musique, que ce soit dans la musique progressive ou dans la musique traditionnelle, ça devient presque une obligation de s’investir totalement dedans. C’est plus difficile parce qu’il n’y a pas de créateur-leader parmi nous qui écrit tout et appelle les autres pour répéter. Avec Pairbon, on jouait dans ZAAR dans lequel il y avait Yann HAZÉRA qui composait énormément. Là effectivement, avec quelqu’un qui a une idée très précise de ce qu’il veut faire, ça va plus vite.
Nous passons du temps à répéter. Nous partons sur de l’improvisation, ça nous demande énormément de temps et de la mise en place pour tout retravailler. Même les morceaux de l’album Òrb ont été retravaillés. Pour nous, un morceau est toujours en évolution. Ce n’est pas parce qu’il a été figé sur un disque qu’il est terminé. Du reste, c’est toujours pour nous très frustrant, deux semaines après, de trouver un plan, une idée, qu’on aurait pu mettre sur le disque. C’est comme ça, c’est une étape du travail.
Le premier disque, Òmi, a marqué une étape de travail. Il a été signé sur un label de musique traditionnelle évolutive, Modal. Il correspondait très bien à cette esthétique-là, même s’il était déjà un peu ailleurs. Le maxi-CD qui a suivi a marqué déjà un tournant vers la musique électronique, qui n’était pas aussi présent dans le premier album, puisqu’il n’y avait pas de machines. Le dernier album, Òrb, est très électronique. En revanche, ce que nous faisons maintenant sur scène est beaucoup plus rock.
Avez-vous malgré tout gardé les programmations ?
Romain : De moins en moins. Depuis que Nicolas nous a rejoint, notre volonté est de sortir des programmations qui nous enfermaient dans une durée et dans un temps. Nous étions prisonniers de ce temps-là. Avec l’arrivée de Nicolas, nous avons essayé de changer le parc électronique. La batterie est devenue en partie électronique. Nicolas joue aussi des pads électroniques, du clavier, etc., ce qui nous permet en fait de reconstituer des séquences électroniques mais jouées en live. Nous gérons les temps nous-mêmes sur scène, et ça change tout parce que ça nous laisse une liberté de jouer qu’on n’avait pas avant. Par exemple, nous étions obligés de jouer à une vitesse précise ; si nous avions envie d’accélérer, nous ne pouvions pas.
Maintenant, il me semble que ça donne une autre dynamique. En comparant les deux derniers concerts que nous avons fait en région parisienne (NDLR : le 4 novembre 2007 au Triton aux Lilas et le 8 juin 2008 à La Roseraie de L’Haye-les-Roses), tu verras une nette différence. Le fait que le tempo ne soit pas figé du début à la fin, ça change quand même nettement un morceau.
Vers une quarantaine improvisée
C’est ça qui vous a aussi poussés à pratiquer l’improvisation ?
Romain : Je pense qu’on grandit. Quand nous avons commencé FAMILHA ARTÚS nous avions une vingtaine d’années ; nous en avons une trentaine maintenant. Forcément, les envies évoluent et la musique improvisée s’impose d’elle-même dans nos pratiques, que ce soit en musique traditionnelle, où elle est énormément présente, ou dans la musique progressive où elle est encore plus présente. Depuis qu’on ne s’occupe que de FAMILHA ARTÚS, nous avons plus de temps et la musique improvisée s’impose.
Pour démarrer les répétitions, nous partons du silence et nous jouons jusqu’à ce qu’il ne se passe plus rien. S’il y a un moment dans l’improvisation qu’on trouve super, on commence à monter un morceau là-dessus. C’est une manière de composer. Il y a certaines improvisations qu’on a enregistrées.
Il y a l’improvisation comme moteur pour aboutir à des compositions et l’improvisation laissée telle quelle ?
Romain : Oui, tout à fait. Nous allons en mettre en écoute sur le site internet. Nous n’en sommes pas encore à faire des concerts de musique improvisée, mais je pense que ça va arriver. Il y a MOSSUR ARTÚS qui fait du bal, FAMILHA ARTÚS qui fait du concert, et on va trouver « Je-ne-sais-pas-trop-quoi-ARTÙS » qui fait de la musique improvisée ! Je pense que nous allons commencer à être capables de le faire.
Il faut avoir des choses à dire en musique improvisée. Ce n’est pas que monter sur scène et puis faire du bruit. La musique improvisée ne s’improvise pas ! Sur le lot de musiques improvisées que nous faisons, il y en a toujours deux ou trois qui sont intéressantes, qu’on a isolées et qu’on va mettre sur internet. Mais de là à proposer uniquement un concert de musique improvisée, je pense que c’est encore une autre étape qui serait à mon avis l’étape de la quarantaine. On n’a rien prévu, on arrive sur scène et on joue en gardant nos fondamentaux, c’est-à-dire la musique gasconne et la musique progressive. Notre répertoire dans les deux cas s’étoffe. Nous sommes de plus en plus à l’aise pour envoyer des riffs ensemble et pour jouer de la musique traditionnelle ensemble.
La musique improvisée permet aussi quelque chose qui est pour nous fondamental : les musiciens sont obligés de communiquer. Il y a aussi une prise de risques essentielle. Pour Nicolas, qui vient d’intégrer le groupe, ça permet de faire connaissance rapidement.
Trafic de racines
Nicolas, ça fait combien de temps que tu as intégré le groupe ?
Nicolas : Depuis octobre 2007. J’ai rencontré Romain à Bordeaux au conservatoire en classe d’électro-acoustique et je connaissais François, que je remplace dans FAMILHA ARTÚS ; c’est un grand ami et c’est lui qui m’a proposé au groupe pour le remplacer. Je ne viens pas du tout de la musique trad. Au départ, je viens plutôt du rock indépendant, du punk, de l’électro-acoustique et de la musique électronique. J’ai pratiqué aussi beaucoup l’improvisation dans ces styles musicaux, sauf dans la musique électronique.
Romain : Nicolas amène un plus, il est aussi batteur ; ce qui nous permet de tourner sur deux batteurs. Mathieu fait aussi de la basse, ma vielle a des spectres qui vont de la basse jusqu’au violon aigu et Tom joue du gros tambour. On arrive donc toujours si on veut à avoir basse, guitare, batterie. Mathieu joue aussi d’un tambour trafiqué et s’est mis au violon. C’est hyper-pratique ! FAMILHA ARTÙS a deux chanteurs et nous sommes tous poly-instrumentistes.
Il y a un piège aussi, c’est de tomber, comme nous avons fait du reste au début dans FAMILHA ARTÚS, dans le zapping. Nous changions tous d’instrument trois fois par morceau ! On s’est quand même spécialisés, nous sommes chacun sur des secteurs précis, mais c’est quand même assez puissant d’avoir toujours une vraie rythmique.
Et de pouvoir garder une sorte d’équilibre entre les instruments dits modernes et les instruments plus « roots ». C’est quelque chose que vous comptez garder ?
Romain : Les instruments roots le sont de plus en plus. Nos flûtes ne sont plus tempérées, nous travaillons sur des choses qui sont de plus en plus radicales à ce niveau-là. Nous sommes presque en train de tomber dans l’ethnique, contrairement au début où nous avions une volonté de vouloir calquer un peu la musique tonale. Nous avions des tambourins avec 4 accords, des vielles qui changeaient de 50 tonalités par morceau. C’était une volonté de se dire : « Nous aussi on peut faire du rock avec ! » Et plus nous avons travaillé, plus nous avons enlevé des effets. Nous avions pris quelqu’un qui s’occupait des machines, et maintenant que nous avons de moins en moins de machines qui jouent carré, nous avons pris quelqu’un qui fait de la musique électronique et qui la joue.
Rustique et métallique
Vous en êtes à quelque chose d’à la fois plus rustique et plus contemporain.
Romain : À fond, oui ! Et puis la disto naturelle, parce que ce sont quand même des crins-crins, tous nos instruments. (rires) Et nous avons fait deux rencontres ces derniers temps qui nous ont vraiment influencés : GOJIRA et HEDNINGARNA. Nous avons enregistré chez GOJIRA, un groupe de métal français composé de grands amis à moi depuis qu’on est gamins. On a commencé la musique ensemble. Ils nous ont montré ce qu’est un investissement dans un groupe et de passer sa vie à essayer de faire marcher un projet. Ils sont en train d’exploser, et ils le méritent amplement parce que ce sont des gens qui ont consacré toute leur vie à leur projet.
Et nous avons croisé le groupe suédois HEDNINGARNA, que nous connaissions déjà musicalement et qui nous a influencés. Nous avons la chance de travailler avec eux sur un gros projet. HEDNINGARNA a un énorme son et quand tu vois la gueule de leurs instruments de près !! Le nyckelharpa d’Anders NORRUDE est une vraie antiquité (NDLR : ce musicien a reconstitué des instruments disparus à partir de modèles uniques exposés dans les musées). Tu le trouves dans la rue, tu ne le ramasses même pas ! Je flipperais de monter avec ça sur scène. C’est incroyable comment c’est destroy ! Quand il joue du nyckelharpa, Anders n’essaye pas de le faire sonner comme un violon. Ça nous a encore plus influencés de les voir, de parler avec eux. Je pense qu’on est en train de revenir à « une vielle c’est une vielle » même si j’ai toujours ma façon d’en jouer et que j’aime bien distordre les choses ; ça restera mon style.
L’évolution de votre son est je pense aussi relatif à celle de vos goûts musicaux ?
Nicolas : Pour moi en tout cas, c’est le rock, donc forcément je n’ai pas pu amener une couche de trad ! Tous les nouveaux sons distordus et mélangés aussi avec des sons électroniques ça a dû forcément changer aussi les sonorités et la façon de jouer du groupe.
Romain : Il n’y a pas longtemps nous avons tous découvert les BATTLES, un groupe de musique pop-électro-rock énorme, qui nous a influencés pour un morceau. Nicolas vient d’arriver et tout de suite nous avons des morceaux qui sonnent plus rock indé et des riffs beaucoup plus simples et plus carrés. Je ne peux pas dire à quoi ressemblera le groupe dans six mois. Il n’y a aucune volonté de notre part de fermer des portes.
Pour le public c’est déroutant, parce qu’il ne sait jamais trop à quoi il va assister. Mais avec le temps, ça devient presque une force parce que les gens commencent à être un peu habitués et il y en a à qui ça plaît énormément. De toute façon le fond commun c’est la musique gasconne et le rock. Je pense que nous ferons pas des choses totalement opposées à ça. On ne va pas se mettre à faire de la musique bretonne avec de la variété ! (rires)
Je pense que c’est pour ça aussi que le groupe existe toujours, parce qu’il nous correspond. Nous n’allons pas jouer un morceau où l’un d’entre nous n’est pas à l’aise. FAMILHA ARTÙS évolue avec nos goûts. En huit ans d’intervalle, forcément on n’a pas écouté la même musique. Dans le camion en ce moment, on se gave de rock indé.
Sauce béarnaise et LSD
Parmi les postulats de base, vous avez revendiqué les musiques progressives. Je suppose que c’est davantage pour vous l’esprit de la musique progressive qui importe plutôt qu’un style convenu ?
Romain : En fait ce n’est pas nous qui avons mis cette étiquette-là, ce sont les gens qui s’y sont identifiés. Pairbon (le bassiste) et moi, nous avons énormément et principalement été influencés par KING CRIMSON, ce qui s’entend encore. Mais c’est une influence autant que Pierre Arrius MESPLÉ, un chanteur traditionnel de la vallée d’Ossau que nous avons beaucoup écouté aussi. C’est notre culture. Moi j’ai grandis là-dedans. Je connais aussi bien la musique de KING CRIMSON
que la musique béarnaise. Nous sommes très influencés par les années 1970, très fans de GONG… Pour MAGMA les avis sont plus partagés, mais ils le sont aussi dans le milieu du rock progressif… Moi j’aime beaucoup MAGMA, Pairbon aussi. En musique progressive, nous continuons à suivre tout ce qui sort sur le label Cuneiform parce qu’avec ZAAR on est sur ce label.
Par ailleurs, Steve FEIGENBAUM de Cuneiform vend notre disque aux États-Unis. Il ne l’a pas pris sur son label parce qu’il ne collait pas à l’image, mais il était quand même intéressé. Cela dit, je crois que nous nous orientons de plus en plus vers l’image de son label, donc nous avons un petit espoir pour le prochain album. C’est une scène que nous suivons forcément, mais qui ne nous connaît pas.
Nous avons joué au Triton pour la sortie du disque. Mais il n’y avait pas beaucoup de monde, parce que les gens ne nous connaissent pas. Alors que je pense que nous aurions une certaine place à trouver aussi pour ce public-là. Récemment, nous sommes entrés en contact avec ACID MOTHERS TEMPLE, un groupe qui joue de la musique gasconne à l’autre bout du Japon ! Si ! Ils ont un album qui s’appelle La Novia (NDLR : ACID MOTHERS TEMPLE & THE MELTING PARAISO U.F.O., sur le label Eclipse, USA – 2000 – en LP et sur Swordfish Records, UK, en CD – 2001). Or, La Novia est un chant traditionnel de Gascogne, de chez nous ! Makoto KAWABATA, le leader, joue le thème tel quel sur sa guitare électrique et le chante en polyphonie.
Nicolas : Sauf qu’il le fait avec de grosses réverbs !
Romain : Quand on connaît les deux, c’est énorme ! On sait qu’on n’est plus les seuls à faire ça, on est au moins deux sur la planète ! (rires) Pour nous c’est comme si on se mettait à jouer de la musique traditionnelle japonaise mais comme eux, c’est-à-dire hyper renseignée et hyper aboutie. Parce qu’ils ne font pas ça comme ça, ils savent de quoi ils parlent.
Nicolas : Sur leur album Mantra of Love, il y a même la photo du dernier joueur de cornemuse des Landes en couverture.
Romain : Dans ce disque, ils chantent La Le Lo, un chant traditionnel gascon… Alors, certains auditeurs trouvent la musique trad’ de chez eux ringarde, mais ils écoutent ACID MOTHERS TEMPLE jouer de la musique traditionnelle gasconne et trouvent ça super ! C’est fort, ça ! En tout cas, nous sommes en train d’essayer de les faire venir à Bordeaux pour jouer avec eux.
Au-delà des formatages
Dans le milieu trad’ et folk, j’imagine qu’on vous reproche de n’être pas assez formatés « traditionnel » ?
Romain : Là, les gens ne comprennent plus ! Nous étions à un stade où il y avait encore des gens patients, mais là c’est fini avec ce qu’on envoie devant un public traditionnel qui est venu pour danser ! (rires) Du coup, le public traditionnel qui commence à bien nous connaître se détache progressivement de nous, alors que le public progressif, traditionnellement, ne vient pas à nous. (rires)
Et le public et la scène « world » ?
Romain : Nous ne sommes pas assez édulcorés pour être dans la world music. En plus nous avons un discours culturel et, malheureusement, nous habitons sur le territoire français et c’est très difficile. Nous ne sommes pas assez exotiques. Nous commençons à toucher des scènes de world music, mais le public qui vient écouter ça est, en général, quand même très aseptisé, et s’il tombe là-dessus il risque d’être encore plus choqué.
Nous ne cherchons pas à nous séparer ou à nous accommoder avec un certain public. Nous avons la liberté de pouvoir vivre de notre musique en faisant ce que nous voulons. Tant que c’est comme ça, c’est super. Nous n’avons pas à faire de concessions, ni à nous poser la question de savoir comment boucler nos dates en étant intermittents. Le jour où nous en serons à vraiment tous crever la dalle, peut-être que nous nous poserons des questions. J’espère alors que ce ne sera pas le côté artistique qui en pâtira.
Indépendance et engagement
C’est pour ça que vous avez décidé de fonctionner dans le cadre d’une structure totalement indépendante ?
Romain : Comme il n’y a pas une scène précise, ni d’argent, ni de diffuseurs spécialisés dans ces musiques-là, nous avons monté notre structure il y a deux ans et demi maintenant, le Collectif Ça-i. Nous avons deux employés à plein temps qui bossent sur la structure et qui commencent à développer. C’est une des grosses forces que nous avons tant que ça marche. Nous sommes en circuit fermé. L’idée pour nous est de créer notre propre mouvement.
Il y a aussi cette notion d’engagement qui revient. C’est un engagement par rapport à ce fonds traditionnel ?
Romain : L’engagement est simple, c’est de vivre à l’endroit où on nous vivons. Nous appelons ça la « culture de territoire ». Tous les gens qui font une action politico-sociale à l’endroit où ils vivent peuvent participer au Collectif Ça-i. Quand nous sommes chez nous, nous faisons de la pédagogie, de la création, de l’action collective. Nous animons le territoire où nous vivons et nous en sommes des acteurs privilégiés, que ce soit pour les musiques actuelles ou les musiques traditionnelles. Nous travaillons avec toutes les associations du coin et nous sommes connus du département et de la région. Ça n’aurait pas de sens de faire ça si nous n’étions pas enracinés à l’endroit où nous vivons. Il faut savoir d’où on vient pour savoir où on va et s’exporter. FAMILHA ARTÚS perdrait vraiment de son sens si d’un seul coup nous n’avions plus aucun ancrage, si ça ne restait que de la diffusion externe.
C’est une grosse association que nous gérons en plus du groupe. Quand nous rentrons chez nous le dimanche après-midi après les concerts, l’après-midi on se repose, et dès le lundi matin nous sommes tous au téléphone, tous en réunion, tous au bureau. Nous ne faisons pas que répéter avec FAMILHA ARTÚS. Pour Nicolas, c’est un peu différent parce qu’il habite un peu plus loin. Pour l’instant son action est surtout sur FAMILHA ARTÚS. Mais nous mettons à profit ses compétences, car il fait aussi de la photo.
Notre volonté est de mettre en commun nos activités extra-artistiques, toutes nos compétences. L’un est plus sur la gestion, l’autre sur la promotion, l’autre sur le site internet… Nous sommes une dizaine d’artistes à vivre avec le collectif et à être tous professionnels. Ça nous demande plus de boulot. On rentre chez nous, on prend le téléphone, on avance, on prend des rendez-vous… Nos deux employés ne travaillent pas dans le vide. Ils travaillent avec une équipe autour et ils s’appuient aussi sur nous pour avancer.
Entretien et photos de concert réalisés par :
Stéphane Fougère et Sylvie Hamon
Site : http://familha.artus.free.fr/
Page : https://artusrock.bandcamp.com/
Page label : https://pagans.bandcamp.com/
Compagnie hartbrut + label Pagans : http://hartbrut.com/artus/
Discographie FAMILHA ARTÚS :
Òmi (CD, 2003, Modal)
Maxi / 2006 (album numérique, CD Maxi, 2006)
Òrb (CD, 2007, autoproducion)
Laboratòri #1 (album numérique, 2008)
L’Estaca (EP, 2009, Pagans)
Drac (CD, 2010, Pagans)
Les aventures discographiques et scéniques de FAMILHA ARTÚS se sont ensuite poursuivies sous le seul nom ARTÚS.
Discographie ARTÚS :
Espèra Un Pauc Projècte (album numérique, 2012)
Artús (CD, 2013, Pagans)
Ors (CD, 2016, Pagans)
L’Intérêt général et moi (Bande Originale) (DVD + CD, 2018, Pagans)
CERC (CD, 2020, Pagans)
(Article original publié dans
TRAVERSES n°24 – octobre 2008,
discographie et liens mis à jour en 2022)