FERNWOOD – Arcadia
(WhiteHorse One Music)
C’est rafraîchissant et magique à la fois. C’est un disque entièrement acoustique, 100 % naturel, fruit de la collaboration entre deux musiciens assez exceptionnels, à savoir Gayle ELLETT, un des membres du groupe progressif DJAM KARET et Todd MONTGOMERY, spécialiste des instruments à cordes ayant étudié le sitar avec un proche de Ravi SHANKAR, un certain Harihar RAO (1927-2013). FERNWOOD est un duo acoustique formé en 2006 ayant déjà à son actif trois albums : Almeria (2008), Sangita (2009) et le petit dernier Arcadia paru cette année.
Nous avons donc deux musiciens à l’expérience solide mais aussi des multi-instrumentistes confirmés, basés en Californie du Sud. Ils ont une large connaissance de la musique qu’elle soit rock, pop, progressive mais aussi folk, world et jazz ; ils sont aussi à l’aise avec le bluegrass que la musique folk irlandaise et les techniques orientales. Pour la sortie de ses précédents albums, FERNWOOD a été présenté comme la rencontre du genre « cowboy avec le monde du jazz et celui de la musique orientale ». Tout un programme, me direz-vous ! Mais cette définition semble être la plus appropriée pour parler de son univers assez singulier.
Arcadia étonne rapidement par son esprit de pureté sonique qui baigne l’ensemble du disque, mais aussi par son originalité s’expliquant par la grande variété d’instruments utilisés (environ une trentaine à eux deux), majoritairement à cordes (nous en comptons au moins vingt-cinq, en grande partie inventés bien avant le milieu du XIXe siècle)… Des instruments essentiellement folkloriques, fabriqués en bois et venant de tous les horizons (Asie, Inde, Amérique du Sud, Europe) et qui émerveilleront les connaisseurs. La liste est longue et impressionnante : par exemple, Gayle ELLETT joue du bouzouki grec, du dilruba, du charango, du tanpura, du surmandal, du ruan (luth chinois), de la contrebasse, du piano, de la guitare, du ukulélé ténor mais également de l’orgue, du mellotron, du moog. Todd MONTGOMERY lui non plus n’est pas avare dans le choix de ses instruments avec le bouzouki irlandais, le sitar, le banjo, la mandoline, la mandole électrique, le violon, diverses guitares, l’EBow, etc. FERNWOOD est plus qu’un simple duo ; il évoque un véritable petit orchestre !
Nous découvrons onze compositions où respirent cette fusion entre divers styles issus de l’Ancien Monde, de l’americana et de la world. Et c’est le dépaysement assuré avec ce soundscape acoustique à la fois classique, contemporain, intense et très exotique. Arcadia s’avère être la parfaite bande originale pour une excursion en plein coeur de la nature : imaginez un décor avec de vastes forêts qui s’étendent à perte de vue, offrant ainsi des paysages et des senteurs boisées uniques. C’est l’antidote idéal contre le stress de la vie quotidienne, une incitation à voyager et à rêver. C’est une musique inspirée, où plane ce sentiment de douce quiétude, d’insouciance, de liberté mais aussi de nostalgie. FERNWOOD propose des moments mélancoliques, folkloriques mais aussi, pouvons nous même ajouter, planants de par leurs caractères répétitifs et minimalistes évidents. Il y a des morceaux qui possèdent cette force de transporter l’auditeur dans ce qui semble être un autre monde (la grâce nostalgique des titres The Pan Chaser ou Vision at Vasquez Rocks avec cet harmonium d’un autre temps). C’est simple et beau à la fois (Crossing the Divide), avec également beaucoup d’ambiances orientales : les mystères du sitar ou d’autres instruments indiens comme la harpe (surmandal) ou la vièle (dilruba) se dévoilant ici et là avec une rare subtilité.
L’album commence avec le printemps (le lumineux Bells Spring qui donne l’impression de s’envoler !) et s’achève avec l’arrivée de l’hiver (Winter Way). Telles les saisons qui défilent, les titres sont des hymnes à l’évasion où les instruments font vibrer leurs cordes comme pour raconter des histoires… De courtes histoires, ne dépassant jamais les cinq minutes, où nous pouvons imaginer quelques voyageurs solitaires à la recherche d’un paradis utopique. Une rude épreuve qui s’annonce longue et sans doute périlleuse. Mais qu’importe ! FERNWOOD vous promet de vous accompagner et de vous faire vivre un périple rempli de mille merveilles soniques.
Cet album fut enregistré à Topanga et à Malibu face à l’océan Pacifique, et réalisé sans compression et sans manipulation à l’ordinateur afin de conserver un son naturel et dynamique. Les musiciens n’ont pas négligé non plus un travail minutieux au niveau des arrangements et de l’orchestration permettant ainsi de mettre en valeur les timbres naturels des instruments.
Arcadia dégage un charme réel. C’est savoureusement mélodique et il s’adresse autant aux fans de folk, de roots qu’aux spécialistes de progressif (la richesse des détails sonores sur Escape from Sycamore Canyon), de musique traditionnelle et de world. Les compositions sont quasi-aériennes et mélangent habilement les traditions musicales américaines, européennes et orientales.
Site : http://fernwoodmusicgroup.com
Cédrick Pesqué