Justin ADAMS and Juldeh CAMARA – Tell No Lies

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Justin ADAMS and Juldeh CAMARA – Tell No Lies
(Real World Records)

Tell No Lies est une leçon doublée d’un mystère. Le mystère tient dans les circonstances, qu’on ignore, qui ont amené deux musiciens aussi éloignés en tout que Justin ADAMS et Juldeh CAMARA à se rencontrer et surtout à faire un album ensemble. La leçon, c’est ce qu’ils ont produit musicalement en seulement deux jours d’enregistrement.

Comme l’annonce le titre de l’album, il n’y a aucun mensonge dedans. Il s’est réellement passé quelque chose de magique durant ces deux jours. Peut-être est-ce dû au fait que l’enregistrement s’est situé dans les studios Real World. Ou peut-être a-t-il suffit qu’aucun des deux musiciens ne se mente à lui-même afin de ne pas mentir à l’autre ni à personne d’autre. On ne le saura jamais vraiment. Mais, ce qui est sûr, c’est le goût savoureux, rafraîchissant, précieux et rare de cet album.

Une légende raconte que le père de Juldeh CAMARA, prénommé Serif, fut enlevé un jour par un génie au milieu d’une forêt de Gambie, son pays. Dans un endroit inconnu de l’homme, le génie proposa à Serif, en l’échange de sa vue, de lui apprendre le ritti, le violon à une corde africain, et de faire de lui un grand musicien. Plus tard, c’est ce père devenu aveugle qui transmettra à son fils ses connaissances et son talent, faisant de lui un griot, c’est-à-dire un musicien capable d’enseigner la tradition, qui est l’essentiel d’un peuple, au travers de ses chansons.

Quel rapport avec Justin ADAMS ? Aucun. Celui-ci est un auteur, compositeur et interprète ayant déjà collaboré avec rien moins que Natacha ATLAS, Sinead O’CONNOR et Robert PLANT. Vraiment aucun rapport ? C’est que Justin ADAMS est tout de même un grand voyageur. Alors peut-être a-t-il rencontré Juldeh CAMARA lors d’un de ses périples. L’énigme plane toujours.

Mais l’association de ces deux musiciens a produit ce qui est sans conteste l’un des albums parmi les plus étonnants de l’année, sorte de blues-rock très électrique retrouvant ses racines musicales purement acoustiques et sa voix chantée originelle.

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L’émotion des retrouvailles est palpable, tout autant que le jeu de séduction entre les deux styles. Peut-être a-t-il juste suffit de capter la vérité de l’instant sans désir de contrôle pour que le miracle se manifeste. N’oublions pas Salha DAWSON MILLER, inventif, impérial et virtuose aux percussions. Il rythme les débats sans jamais interférer, à la fois effacé et toujours bien présent, indispensable et pétri de modestie.

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Tell No Lies est un croisement entre l’évidence et l’audace, le hasard et la nécessité, un homme et son frère de sang jusque là ignoré. C’est aussi une rencontre unique qui ne demande qu’à devenir mondiale et permanente. Aller l’un vers l’autre, jouer l’un avec l’autre et s’apprécier l’un et l’autre. L’histoire des relations entre les hommes ne pourrait-elle pas être toujours aussi simple ? Tell No Lies. Mais rêvons tout de même de ce prochain Real World que deux musiciens ont déjà commencé à bâtir.

Frédéric Gerchambeau

Page : https://realworldrecords.bandcamp.com/album/tell-no-lies

Label : www.realworldrecords.com

(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n° 44 – Automne 2009)

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