Loreena McKENNITT – Nights from the Alhambra (DVD + 2CD)
(Quinland Road/Keltia Musique)
La parution de ce coffret live contenant un DVD complété par deux CD restituant à l’identique sa piste audio, suit de seulement quelques mois celle de l’album An Ancient Muse. Une production de Loreena McKENNITT peut en cacher une autre, ce qui ne peut que ravir les admirateurs de l’égérie à la chevelure de feu que les longues années (presque une décennie) d’absence scénique et de silence discographique a pu inquiéter.
En fait, la performance live contenue dans ce luxueux coffret est antérieure à la sortie du dernier album de Loreena, et annonçait en quelque sorte son grand retour. Et le moins que l’on puisse dire est que celui-ci a été célébré en grandes pompes, puisqu’il a eu lieu dans un lieu chargé d’histoire et doté d’une architecture envoûtante aux ornementations grisantes, bref un lieu à l’image de la musique de l’artiste canadienne. Certes, l’Alhambra, édifié à Grenade, en Espagne, est davantage relié à l’histoire mauresque plutôt que celtique, mais il suffit de se laisser porter par les résonances, d’autant que Loreena McKENNITT cultive un panceltisme du nouvel-âge ouvert aux sons du monde, notamment méditerranéens et orientaux. Et quand on sait que l’enceinte du palais de l’Alhambra n’a accueilli qu’une poignée d’artistes triés sur le volet, on mesure le caractère exceptionnel de l’événement.
Par rapport aux albums live déjà publiés (Live in San Francisco, Live in Paris and Toronto), on pourra regretter que le répertoire scénique contienne toujours un peu les mêmes morceaux. Le CD An Ancient Muse n’est guère plus représenté que les autres (seulement trois morceaux), mais il n’était pas encore sorti à l’époque où ces concerts ont été donnés à l’Alhambra, et ces derniers n’avaient manifestement pas pour rôle d’assurer la promotion de celui-ci. Cela dit, l’inclusion de Raglan Road est une belle surprise, puisque ce morceau est rare, ne figurant que sur la version collector de An Ancient Muse. La set-list offre donc un survol panoramique de la discographie de Loreena (à l’exception habituelle des albums To Drive the Cold Winter away et A Winter Garden – pas de surprise donc de ce côté-là), avec une singulière prédominance des compositions de l’album The Visit.
Dès l’écoute du morceau d’ouverture, The Mystic Dream, on remarque que les versions diffèrent sensiblement de celles déjà gravées. La formation de Loreena McKENNITT s’est renouvelée, et les arrangements ont été repensés en conséquence. Aux « habituels » violons de Hugh MARSH, aux cordes acoustiques et électriques de Brian HUGHES, à la vielle à roue de Nigel EATON, au violoncelle de Caroline LAVELLE, aux percussions de Rick LAZAR se sont ajoutés de nouveaux timbres ouvrant sur d’autres horizons, comme le kanoun de Panos DIMITRAKOPOULOS, la lyra de Sokratis SINOPOULOS, la cornemuse irlandaise et le bodhran de Steảfản HANNIGAN, le oud de Haig YAZDJIAN, etc.
Plusieurs anciennes pièces sont ainsi interprétées dans un format plus ramassé (The Mummers’ Dance, The Bonny Swans, The Lady of Shalott…). L’ajout d’une batterie, discutable sur le dernier album studio, fonctionne mieux dans le contexte scénique, car elle dynamise les morceaux plus remuants, ce qui crée plus de contraste avec les ballades et morceaux plus contemplatifs où la harpe prédomine. Loreena McKENNITT sait donc redorer et recolorer ses tranches de rêve, ce que ne manqueront pas d’apprécier ses spectateurs et auditeurs.
On pourrait en somme résumer l’atmosphère qui se dégage de cette performance par la célèbre maxime baudelairienne : « Ici, tout n’est qu’ordre et beauté, luxe, calme (enfin, pas toujours, mais bon…) et volupté. »
Druidix
Site : https://loreenamckennitt.com/
(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS n°38 – printemps 2008)