SERENDOU – Zinder

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SERENDOU – Zinder
(Hirustica / L’Autre Distribution)

Il y a des rencontres musicales qui restent sans lendemain, et d’autres qui prennent le temps de mûrir, de rebondir, et de laisser des traces discographiques de loin en loin. C’est le cas de SERENDOU, projet initié en 2006 et qui avait gravé son premier CD, Avel an Douar, en 2011. Cinq ans plus tard, voici sa seconde empreinte discographique, et c’est comme si le temps n’avait pas passé. Le trio s’est retrouvé et continue à tracer son chemin entre Bretagne et Niger. Après avoir fait souffler le vent de la Terre (traduction de « Avel an Douar »), le voici qui plante sa tente à Zinder (alias Damagaram), le chef-lieu de la région nigérienne du même nom, au climat tropical humide et au sol granitique, bref l’un de ces endroits susceptibles de vous provoquer des hallucinations tant visuelles qu’auditives. C’est du reste l’impression qui se dégage de l’écoute de ce nouveau CD de SERENDOU.

Yacouba MOUMOUNI (MAMAR KASSEY), Jean-Luc THOMAS et Boubacar SOULEYMANE déploient des myriades d’idées musicales qui contribuent à entretenir un certain flou quant à la provenance de ce qui se donne à entendre et la destination où ils nous mènent. Bien sûr, officiellement, on navigue en plein univers pastoral nigérien, de par la prédominance acoustique de l’instrumentation.

Entre la flûte serendou de MOUMOUNI et la flûte traversière en bois de THOMAS, la complicité est totale, la fusion est vivante, vibrante, et les entrelacs mélodiques qu’elles développent enivrent infailliblement les esprits comme les corps, surtout quand s’y ajoute le groove et l’étincelle rythmique si caractéristique de la calebasse de SOULEYMANE.

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C’est toujours le Niger qui transpire dans la voix chaude et radieuse de Yacouba MOUMOUNI, ainsi qu’entre les cordes sèches et ondulantes de son kamélé n’goni. Mais quand certains traitements électroniques subreptices viennent brouiller les pistes, électrisant les cordes ou faisant tourner les rythmes en boucles, ou rendant les flûtes plus granitiques, on commence à se demander si la température ambiante ne désoriente pas nos conduits rationnels ou nous fait miroiter quelque mirage sonore…

Car nos trois compères s’y entendent à cultiver leurs musardises mélodiques, leurs batifolages harmoniques et leurs floraisons rythmiques, effaçant tout repère entre écriture et improvisation. Et cette fois, ils ne sont pas seuls. Michel GODARD et son tuba extenseur d’espace se sont joints aux libations sur deux titres. Et, dans la seconde partie du disque, ce sont des instruments tout aussi exotiques, voire plus, qui rallie la caravane « serendou-esque », tel le pifano et le japurutu (flûtes brésiliennes) de Carlos MALTA, et le pandeiro (percussion hispano-brésilienne) de Bernardo AGUILAR.

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À part ça, on est toujours à Zinder, au Niger, les stances humanistes et engagées de Yacouba MOUMOUNI sont là pour nous le rappeler. Mais ça n’empêche pas Jean-Luc THOMAS de glisser deux / trois danses ridées ou plinn de cette Bretagne que l’on dit moins ensoleillée mais qui, dans ce contexte, est de nature à provoquer des coups de soleil dans les oreilles.

SERENDOU a transformé Zinder en un territoire discographique de tous les possibles, en a fait la source d’un dialogue aussi enthousiaste que motivant qui permet aux différences d’élaborer un creuset commun de compréhension artistique particulièrement fécond en émerveillements. Au fond, ce sont moins des mirages soniques que génère SERENDOU que des traces indélébiles qu’il imprime dans les âmes avides de pèlerinages musicaux à la fois ancrés dans la Terre et s’épanouissant dans les étoiles. Pour cela, Zinder est une destination qui ne se refuse pas.

Stéphane Fougère

Label : www.hirustica.com

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