Swaziland : Chants des Swazi

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Swaziland : Chants des Swazi
(AIMP /VDE-Gallo)

Enclavé entre l’Afrique du Sud et le Mozambique, le Swaziland, réputé être le plus petit pays du continent africain, est la terre des Swazi, ou Swati, une ethnie de la branche nguni des Bantous, lesquels ont migré dans cette région depuis le XIXe siècle sous la pression des Boers. Au début du XXe siècle, le Swaziland fut une colonie britannique avant d’accéder à l’indépendance en 1968. Depuis lors, le pays est resté une monarchie absolue. Les valeurs traditionnelles y sont restées vivaces, et la musique – surtout vocale – et la danse y sont toujours considérées comme actes sociaux. Elles sont intégrées aux divers événements, commémorations et rituels donnés en l’honneur du souverain et destinés à consolider l’identité nationale swazi.

Il existe toutefois d’autres musiques liées à l’introspection et au divertissement. Ce CD présente un répertoire provenant de la société rurale swazi qui mêle chants traditionnels et compositions adaptées de la tradition. Il permet d’entendre des instruments qui ne sont pas associés aux cérémonies traditionnelles et qui, par conséquent, sont en proie au déclin, puisque ne bénéficiant d’aucun statut officiel. Ils font pourtant partie intégrante des arts traditionnels swazi.

Ces précieux enregistrements réalisés par Mark BRADSHAW en 2005 mettent donc en évidence une musique certes d’essence vocale, mais accompagnée principalement par des arcs musicaux. C’est surtout l’arc nommé makhweyane, conçu avec un bâton, une calebasse, du tissu et du fil de fer, qui est ici mis en valeur par quatre musiciens (deux hommes et deux femmes), chacun jouant et chantant en solo.

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Une seule pièce (Khaka Gogogo) permet d’écouter le sikhelekehle, un monocorde dont la corde est en fil de fer et dont le résonateur n’est autre qu’un bidon à huile. Effet grinçant et limite psychédélique garanti !

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Deux morceaux (Dolofiya, Dinane) sont de même joués à la guimbarde sitolotolo, à la manière des arcs musicaux, sauf que cette fois c’est la bouche qui sert de résonateur et génère diverses harmoniques.

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Enfin, on découvre également la musique du groupe SIGUBHU SEBALOZI, constitué d’une guitare acoustique, d’une guitare basse, d’un concertina et d’une vièle, preuves que la modernité peut être appréhendée sans complexe par les Swazi.

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Cette modernité se reflète aussi dans certains textes, lesquels, tout en restant attachés aux valeurs rurales swazi en intégrant parfois des louanges adressés à des personnes d’une famille, peuvent traiter d’histoire locale, d’amours perdues, de problèmes conjugaux, de l’irrespect de la femme envers son mari ou des enfants envers leur père, de l’infidélité et de la crainte des MST, ou bien stigmatiser une personne insupportable ou encore raconter l’apparition des premiers transports en commun (le bus) qui ont bouleversé le mode de vie des villageois.

Issus de la tradition ou récemment composés, ces chants et ces musiques illustrent un phénomène de réappropriation de la part des musiciens et chanteurs swazi qui rassure quant à la perpétuation et à la réinvention du patrimoine traditionnel du Swaziland.

Stéphane Fougère

Label : www.vdegallo.ch

(Chronique originale publiée dans
ETHNOTEMPOS en 2010)

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