Denis FRAJERMAN & Antoine VOLODINE – Vociférations, Cantopéra

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Denis FRAJERMAN & Antoine VOLODINE –
Vociférations, Cantopéra
(Le Cluricaun)

denis-frajerman-antoine-volodine-vociferations-cantoperaL’univers d’Antoine VOLODINE est l’un des plus passionnants de la littérature contemporaine. Loin, très loin des écrivains autocentrés sur leur petit quotidien, il nous emmène dans un ailleurs indéterminé, tant géographiquement que chronologiquement, qui a bien quelque chose à voir avec la littérature fantastique, ses premiers ouvrages furent d’ailleurs publiés, comme ceux de Jacques BARBERI dans la collection Présence du Futur chez Denoël, mais dont l’originalité se déploie dans des mondes parallèles et labyrinthiques qui évoquent autant Franz KAFKA que Jorge Luis BORGES. Denis FRAJERMAN membre du collectif PALO ALTO, dans lequel officie aussi l’écrivain et saxophoniste Jacques BARBERI, bénéficiait donc d’une mitoyenneté immédiate avec Antoine VOLODINE, ce qui les amena très vite à tracer de nouveaux chemins dans leurs dédales littéraires et musicaux. Leur première collaboration fut, en 1996, la mise en onde par Denis FRAJERMAN de poèmes récités par VOLODINE sur France Culture. Puis vinrent les deux pierres angulaires de leurs œuvres respectives, Les Suites Volodine de Denis FRAJERMAN sur Noise Museum en 1998 et Des Anges Mineurs d’Antoine VOLODINE aux éditions du Seuil en 1999.

L’aventure continue, recommence, voire ne fait que débuter. En 2004 France Culture a produit Vociférations Cantopéra, dans le cadre de ses Ateliers de Création Radiophonique. S’inspirant cette fois de l’ouvrage Slogans de Maria SOUDAÏEVA, qu’il a traduit du russe pour les éditions de l’Olivier, Antoine VOLODINE a écrit un long poème, suite d’imprécations, douces dans leurs lentes énumérations et violentes dans leur contenu : « Même sous le feu de l’ennemi, développe des rites grandioses », « Petite sœur, avance sans frémir, petite sœur avance, frappe, ferme la matrice avant 17h16 » ou « Si ta tête se détache, ne t’alarme pas ». La voix de l’écrivain est, il faut le souligner, plutôt reposante. Il ne crie pas, ne vocifère pas, contrairement à ce que peut indiquer le titre de l’œuvre. La vocifération se situe dans le texte même, particulièrement troublant.

Pour ce poème Denis FRAJERMAN a composé une musique pour percussions, cordes, saxophone et synthétiseur, qui est tout aussi indéfinissable. Il s’agit d’une « musique du monde », d’un monde imaginaire où l’Amérique du Sud serait à portée de voix de la Chine ; d’une musique industrielle, où les machines dialoguent avec les grenouilles et les grillons ; d’une musique instrumentale, où un saxophone libre ignore les clichés du jazz. Cette composition est tout sauf illustrative. Textes et sons s’imbriquent étroitement dans un glissement temporel surréaliste. L’aventure post-exotique continue, « après la fin de la route, reprends la route ».

Eric Deshayes

Site : http://denisfrajerman.com

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