Emmanuelle PARRENIN – Maison cube

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Emmanuelle PARRENIN – Maison cube
(Les Disques Bien)

Emmanuelle PARRENIN a pu croiser vos chemins auditifs il y a longtemps, maintenant, à l’occasion de la parution de premier et jusqu’alors unique album sous son nom : Maison rose. Cet album est paru en 1977 sur le label Ballon noir qui a publié entre autre le folk progressif indispensable de MALICORNE. Réédité en 2006 en CD, il a permis à ceux qui seraient passés à côté, une sorte de rattrapage. Depuis ces temps immémoriaux, la dame PARRENIN n’avait plus donné de nouvelles. Devenue sourde, elle avait finalement ré-appris à faire de la musique tout en gagnant du terrain sur ce handicap. Ce disque, Maison cube, paru en 2011, est donc un disque du retour et l’on espère qu’il sera suivi d’autres car il a été, pour moi, une révélation grâce à des vidéos de concerts, postées sur Youtube que je vous conseille d’écouter en lisant cette chronique (oui !).

Pour les oreilles des lecteurs de ces lignes, les compositions de ce disque peuvent rester conventionnelles, car il s’agit souvent de chansons. Pourtant, à l’écoute, vous découvrirez alors une musique qui allie les sonorités rugueuses et mystérieuses de la vielle à roue jouée par l’artiste, des instruments issus du monde folk / trad dans des arrangements électriques subtils qui n’hésitent pas à jouer avec les dissonances ou le planant.

Ces arrangements s’appuient sur le jeu des voix superposées, les onomatopées et les bruits de bouches, les grattements de cordes et de cymbales, les couleurs exotiques venues de la sanza, des tambours d’eau, du balafon et des bols chantants, les cordes pincées de l’épinette et des harpes, les cordes désaccordées de la guitare acoustique… il y en a trop pour tout dire.

La qualité de l’enregistrement est un voyage en lui-même, chaque grain de corde frappée, chaque respiration, contribuent à nous faire entrer dans cette musique.

Les textes portent de façon évidente la trace de la lutte d’Emmanuelle PARRENIN contre le handicap (« dans ma musique actuelle, il y a la trace de ce que j’ai traversé. La recherche d’un certain frottement, né de choses pas toujours agréables », Télérama n° 3263 du 25 juillet 2012). Ils conduisent à un voyage plutôt intérieur qui invite à relativiser notre quotidien (Le Secret), qui nous fait atterrir « fantasmagoriquement » sur la lune (La Bar Mitsva) ou participer de l’effort individuel pour lutter contre le handicap (L’École de Patience, Pleuré…).

D’autres textes racontent des histoires plus prosaïques, mais elles sont marquées du sceau de la recherche d’un idéal (Collectage, Nulle part). Le morceau-titre relève plutôt de ces histoires (naissance, abandon puis renaissance de ladite Maison cube), mais il se transforme au fil de ses presque onze minutes, d’un début de répétitions au kit de percussions, basse, piano et chœurs féminins pour se conclure dans un capharnaüm bruitiste emmené par la vielle à roue, comme le décollage d’une soucoupe volante.

Folk et tourné vers l’avenir.

Frédéric Vion

(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°33 – Juin 2013)

Site : https://emmanuelleparrenin.bandcamp.com/

Label : http://lesdisquesbien.com

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