L’ENSEMBLE RAYÉ – Les Contrepoints cardinaux
(Kein & Aber)
Qu’on se le dise : un disque de L’ENSEMBLE RAYÉ parvient à dépayser bien plus qu’un guide de voyages ou un album de vacances. Les Contrepoints cardinaux ne faillissent pas à la règle avec leurs quatorze ritournelles suaves et mutines qui semblent nous enjoindre de ne pas grandir trop vite ou trop bêtes. Une fois de plus, la « famille » de Neuchâtel projette sur l’écran géant de nos conduits auditifs ses historiettes acoustiques chiadées et peinturlurées d’impressions et d’émotions primesautières ou rêvasseuses.
Car c’est bien un esprit de famille plutôt que de groupe au sens strict qui s’exprime ici, les pièces pouvant être jouées en solitaire ou nécessiter un rassemblement éloquent à cinq ou six. Et comme chaque musicien est plus ou moins multi-instrumentiste, on n’est jamais volés sur le rendu des couleurs…
C’est ainsi qu’aux côtés de Jean-20 HUGUENIN, Cédric VUILLE et Pierre KAUFMANN, on retrouve au gré des sentiers tracés les jeunes recrues Julien BAILLOD et Yann ALTERMATH, mais aussi des anciens « Rayés » comme Momo ROSSEL, Shirley-Anne HOFMANN, ou des amis de la famille tel Pippin BARNETT ou Daniel SPAHNI (LARSEN RUPIN).
Pour ne rien gâcher, la pochette et le livret ont été illustrés par Tatjana HAUPTMANN, comme au bon vieux temps de Même en hiver… et de Quelques pièces détachées, les deux références classiques de la communauté à rayures ! Une fois de plus, l’illustratrice a fait des merveilles, et toute ressemblance avec l’univers des pochades gonguesques de Daevid ALLEN ne fait que souligner la constante fraîcheur ludique qui émane des inspirations rayées et qui agit comme un philtre de jouvence.
Plusieurs pièces ont du reste accompagné des spectacles de marionnettes. La trajectoire de ces Contrepoints cardinaux passe ainsi par le ska (Gengis K.), les danses sud-américaines (Cumbada), le folk irlandais (Evergreen), sans avoir à forcer le trait « world » pour être à la mode (une notion inexistante dans le dictionnaire de L’ENSEMBLE RAYÉ).
Erik SATIE est revivifié au reggae (La Grande Ritournelle), clin d’œil est fait au PENGUIN CAFE ORCHESTRA (L’Envol du pingouin), tandis que Robert WYATT est salué bien bas avec cette version de Left on Man qui avait déjà eu les honneurs de la compilation MARCHETTI/ WYATT (In Poly-Sons).
C’est tout de même extraordinaire comme les disques de L’ENSEMBLE RAYÉ arrivent à faire disparaître les rides d’un visage mieux que n’importe quelle crème de beauté et à désaltérer bien mieux que le Pastis !
Stéphane Fougère
Site : www.ensembleraye.ch
(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°11 – juin 2002)