POLYMORPHIE
au Festival Rock In Opposition
à Cap Découverte (81)
le 16 septembre 2018
Autre formation lyonnaise, émanant cette fois de l’association Le Grolektif, POLYMORPHIE avait jusqu’à présent échappé aux radars du public de ce festival RIO dédié aux musiques rock d’orientation avant-gardiste. Pourtant, ses membres ne sont pas totalement inconnus des aficionados du festival, puisque son fondateur, Romain DUGELAY, s’y était déjà fait entendre avec PIXVAE. D’autres membres jouent de même dans des formations déjà présentées au RIO, comme UKANDANZ et CHROMB !. Et histoire d’élargir le giron familial, on peut même dire que POLYMORPHIE combine les membres du power-trio KOUMA (Romain DUGELAY au saxophone alto et aux compos, Damien CLUZEL à la guitare baryton, Léo DUMONT à la batterie) et du duo électro-coldwave-R’B EROTIC MARKET (Marine PELLEGRINI aux claviers et au chant et Lucas GARNIER aux claviers) et ajoute Clément EDOUARD (de LUNATIC TOYS) au second saxophone alto. Mais ces accointances généalogiques ne signifient pas pour autant que nous étions en territoire musical familier. Ça tombe bien, on vient aussi au Festival Rock In Opposition pour faire des découvertes au-delà des sentiers battus.
Il était donc grand temps de programmer ce sextet avec son répertoire conçu pour sa création Cellule, d’autant que la sortie discographique de cette dernière remonte quand même à 2015, le groupe planchant déjà sur un autre projet.
Cellule est la seconde empreinte discographique de POLYMORPHIE, après un premier opus dédié à l’univers et aux paroles de Nick CAVE, et convoque cette fois plusieurs auteurs littéraires dont le point commun est d’avoir écrit sur le thème de l’enfermement carcéral. Ces auteurs sont Oscar WILDE, Jean ZAY, VERLAINE, Albertine SARRAZIN, ainsi que qu’un détenu anonyme nommé Xavier, dont le poème est tiré de Paroles de détenus de Jean-Pierre GUÉNO. C’est à partir de cette matière littéraire glaçante que Romain DUGELAY a conçu une dramaturgie narrative à partir de laquelle il a conçu la musique. Les morceaux portent du reste pour titres les prénoms des auteurs susnommés, ou bien sont répertoriés sous les initiales OW1, OW2, etc.
À cet univers cellulaire répond donc une écriture musicale dont les cellules harmoniques et rythmiques sont taillées au couteau, ciselées avec minutie, et caractérisées par un son acide, froid, sec, nerveux, dense, mais accordant aussi des espaces pour improviser.
La musique, effectivement polymorphe mais cohérente, alterne poussées d’effroi, espaces minimalistes, distorsions grinçantes, moments de fièvre rageuse et pauses réflexives pour dire l’ennui, la solitude, l’isolement, l’ostracisme, le retranchement, la résistance, la douleur, le « désespoir aigu », la « crasse fière », les fantômes nocturnes qui « font revivre ces murs », et autant de paroles écorchées que relaie Marine PELLEGRINI de sa voix scandée claire, placide, sa diction slammée lumineuse, contrastant avec la noirceur virulente de ses complices instrumentalistes. Convoquant gorges serrées et gorges déployées, la Cellule de POLYMORPHIE sublime crument et poétise à vif.
Vous cherchiez une actualisation musicale et thématique de l’esprit Rock In Opposition ? POLYMORPHIE l’a apparemment mise en œuvre.
Site : https://polymorphie.bandcamp.com/
CD : POLYMORPHIE – Cellule (2015, Grolektif Productions)
Article et Photos : Stéphane Fougère
Lire le compte-rendu du Festival Rock In Opposition 2018.
Diaporama photos :
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