Steve HACKETT : GENESIS Revisited Band & Orchestra – Live at the Royal Festival Hall
(Inside Out)
C’est devenu une habitude chez Steve HACKETT de sortir un live après chacune de ses tournées, en format CD / DVD. Nous n’allons pas nous en plaindre surtout que nous n’avons pas eu droit à ce type de show incluant un orchestre ; le dernier passage à Paris avec son groupe en 2019 fêtait les quarante ans de Spectral Mornings et rendait hommage à l’album de GENESIS Selling England by the Pound, joué pour l’occasion intégralement. La formation qui nous intéresse ici réunit le groupe de Steve et un orchestre (le « Steve HACKETT GENESIS Revisited Band with Orchestra ») dans le cadre d’une petite tournée au Royaume Uni entre le 1er et le 8 octobre 2018.
Quelques semaines plus tard, nous avons pu constater l’existence d’un bootleg disponible au Japon qui proposait le concert du 5 octobre à Birmingham, au Symphony Hall. Cela nous donnait ainsi une idée d’un tel projet et surtout de la setlist proposée. Il faudra attendre l’année suivante pour voir surgir ce superbe document officiel, contenant deux CDs et un DVD (ou un Blu-ray) ; ce live complet fut enregistré et filmé à Londres le 4 octobre 2018.
La setlist, vous le devinerez, privilégie le répertoire de GENESIS et la période sacrée couvrant les années 1971-1977. Au total, nous découvrons une dizaine de titres dont cinq sont issus de ses albums en solo, Voyage of the Acolyte, Defector, To Watch the Storms (avec Serpentine Song, une chanson-ballade simpliste qui ne fait pas partie de ses plus grandes réussites), Wolflight et The Night Siren. Il revisite ce répertoire avec ses fidèles musiciens (Roger KING, Nad SYLVAN, Rob TOWNSEND, Gary O’TOOLE, Jonas REINGOLD ainsi que son frère et sa belle sœur comme invités spéciaux) et un grand orchestre composé de cordes, de cuivres et autres instruments de percussion.
Le résultat est impressionnant, émouvant et flamboyant sans pour autant tomber dans quelque chose de grandiloquent et de prétentieux. L’orchestre se mêle au groupe avec une certaine aisance, dévoilant toute sa puissance et sa grandeur quand cela est nécessaire (par exemple sur Out of the Body ou Dancing with the Moonlit Knight), et surtout en évitant le côté exagérément pompeux qui aurait pu tout gâcher. Cela aurait été insupportable. En fait l’orchestre n’en fait pas trop, et c’est plutôt une bonne chose de ne pas avoir succombé à la tentation de vouloir être trop démonstratif durant un événement aussi unique.
L’intérêt d’un tel concert réside donc dans la parfaite harmonie, le juste équilibre existant entre Steve, sa guitare, ses propres musiciens, et l’orchestre dont les arrangements sont assez bien travaillés. Et finalement, lorsque l’univers du classique rencontre l’électrique et le rock progressif, cela donne des versions assez impressionnantes : par exemple, Firth of Fifth, The Steppes, où plane l’esprit de RAVEL avec son Boléro, ou le magnifique Shadow of the Hierophant pour ne citer que ces titres qui vous procurent d’innombrables frissons.
L’ajout d’ambiances et de sonorités spécifiques aux cuivres et aux cordes amplifie le côté féérique et symphonique de la musique (The Steppes, Dancing with the Moonlit Knight) qui atteint son apogée maximum sur le CD 1 avec Shadow of the Hierophant (composé par HACKETT et RUTHERFORD durant les sessions d’enregistrement de Foxtrot) et sur le CD 2 avec Afterglow ou certaines parties de Supper’s Ready.
Ce live est en tout cas une très belle expérience, où la musique, toujours intemporelle, oscille élégamment entre une mélancolie purement génésienne qui s’exprime au plus haut niveau avec une telle formation (Afterglow, Blood on the Rooftops) et un rock progressif d’antan qui n’existe plus vraiment aujourd’hui (Dancing with the Moonlit Knight, un incroyable Supper’s Ready dans sa version intégrale et le fameux The Musical Box).
Les fans seront donc comblés de découvrir ce superbe concert proposant les pièces les plus marquantes du groupe et quelques titres de Steve.
Ce qui nous amène à regretter une chose : qu’en concert, Steve HACKETT ne fasse pas plus de Steve HACKETT. Comme nous avons pu l’entendre lors de ses derniers passages à Paris, son répertoire solo ne se limite qu’au premier set. Le deuxième étant consacré à GENESIS. En fait, depuis l’activation de ce projet de rejouer du GENESIS, le guitariste fait salle comble à chacun de ses passages. C’est une bonne chose bien sûr et au fond, pourquoi s’en priverait il ?
Mais, cela semble satisfaire les nostalgiques dont certains ne connaissent quasiment rien (ou disons, le strict minimum) de ses propres albums hors GENESIS. Nous aimerions voir un concert de Steve sans toutes ces reprises de GENESIS : un véritable concert avec ses compositions personnelles incluant par exemple ce qu’il a pu faire dans les années 1980 (les albums Cured, Highly Strung ou Till We Have Faces sont assez oubliés) et, pourquoi pas ?, un concert simplement acoustique avec Roger KING (ou Nick MAGNUS) et son frère John, comme il y a quelques années de cela dans le cadre du Genesis Event.
Nous avons la triste impression que son œuvre solo s’efface devant son passé de guitariste au sein de GENESIS. Comme le soulignait le batteur du groupe HUSKER DU, Grant HART, une société nostalgique est une société malade.
Les gens ne se déplaceraient-ils que pour entendre du GENESIS ? S’il ne jouait pas autant de titres du groupe, est-ce que les gens viendraient le voir ? Et est-ce que Steve pourrait faire des concerts à Paris, dans des grandes salles comme l’Olympia, sans appâter le public avec de tels projets ? Nous avons le droit d’en douter.
Le prochain concert de Steve HACKETT est prévu pour le 25 septembre 2020 à la salle Pleyel où il compte reprendre le live de GENESIS de 1977, Seconds Out, et fêter aussi les quarante ans de son quatrième album solo Defector.
Cédrick Pesqué
Site : www.hackettsongs.com/
Label : www.insideoutmusic.com