UBU et la MerdRe
(In Poly Sons / Gazul)
Cornegidouille ! Le maître des Phynances peut se frotter la giborgne : la compilation ‘pataphysique (avec apostrophe s’il vous plaît) dont il était le divin sujet, « sillonnée » initialement en 1988, avec un face « antérieure » et une face « postérieure », fait enfin l’objet d’un pressage numérique, dans le cadre de la collection « Early Times » du label non moins sempiternellement ‘pataphysique, In Poly Sons. Il eut été impardonnable de laisser croupir dans les « anales » de la Chambre-à-sous cet hommage postérieurisé au Père UBU et à sa merdRe sacrale, n’en déplaise aux nobles, magistrats, financiers et autres salopins non encore décervelés par sa flatulente majesté.
Ouvrez donc grandes vos « oneilles » ; même ceux qui ne sont pas familiers de l’œuvre jarryque ne manqueront pas de remarquer la participation de quelques figures marquantes des musiques dites nouvelles et d’autres plus obscures. Ainsi de Guigou CHENEVIER, qui revisite à sa façon une scène d’UBU roi (UBU parle en dormant) avec le concours de Chris CHANET en mode « étron-foutesque » ; des Nancéens de SOIXANTE ÉTAGES, qui nous font vivre les pétarades aérophagiques Sur le front des guerres ubuesques ; de Jean-François PAUVROS, qui a troqué le mordant contre le fondant pour nettoyer nos gencives auditives (La Chanson du cure-dent) ;
d’OFFICER!, qui étire le débat jusqu’à l’engourdissement hypnotique en effet de nouilles (Spaghettification) ; de Pierre BASTIEN, qui adapte avec MECANIUM la fameuse « Chanson du décervelage » sans se prendre la tête (La Philanthropie d’UBU charpentier).
De son côté, FAMILY FODDER verse dans la ritournelle « lars-hollmerienne » existentielle (Is There la MerdRe after the Death?) ; PTÔSE nous fait gravir martialement la Montagne des couteaux sans tirer sur la corde ; UN BOUK UNICORN rend hommage à la Mère Denis (Ma femme et la machine), tandis que le violoncelle de Tom CORA et le saxophone de Hans REICHEL se dévergondent joliment pour nous familiariser avec les rouages intimes de la machine à décerveler (The Pig-Pinching Machine).
Quant à COSTES, il a placé, comme on pouvait s’y attendre, le débat au niveau purement fécal (Cacasphère), ce qui fait dire en chœur à BRODÉ TANGO qu’Ubuducu. Tous témoignent de leur fascination bien légitime pour cette fantasmatique pompe à merdRe. On s’étonne juste de ne point voir évoqués ici le croc à phynances et le bâton à physique, autres armes-fétiches du roi des Polonais…
Parmi tout ce beau monde, il est difficile de savoir quel est l’intrus d’UBU (!), tant les démarches de ces dévoués palotins sont différentes. Oh, et puis merdRe ! Que ceux qui renâclent passent à la trappe. « Hourrah, cornes-au-cul, vive le Père UBU ! »
Stéphane Fougère
(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°7 – octobre 2000
et remaniée en 2020)