Vladiswar NADISHANA : Un écho lointain de Sibérie

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Vladiswar NADISHANA

Un écho lointain de Sibérie

Quand on dit d’un artiste qu’il est multi-instrumentiste, on l’imagine bien maîtriser environ trois à quatre instruments. Vladiswar NADISHANA, lui, en joue plus d’une centaine ! Cet artiste russe, découvert en France par le biais de ses collaborations avec le quatuor vocal expérimental ORGAN’X, le percussionniste Steve SHEHAN et le HADOUK TRIO, est décidément une énigme de la nature, en même temps qu’un créateur hors pair. Maîtrisant divers instruments à cordes, à vents et de percussions, dont une bonne partie ont été inventés ou réinventés par lui, Vladiswar NADISHANA a la fibre de la fusion ethnique et du métissage ethno-jazz bigarré et sinueux, mais dont les racines sont nourries par l’écho d’une tradition sibérienne aujourd’hui disparue, et que NADISHANA s’évertue à redynamiser. À partir d’une culture improbable, il a généré une forme très personnelle de folklore sinon imaginaire, au moins poly-dimensionnel. Pour ETHNOTEMPOS / RYTHMES CROISÉS, Vladiswar NADISHANA ouvre les portes de son univers envoûtant.

Si le fait d’être multi-instrumentaliste ne suffit pas à devenir un artiste total, composer des musiques, construire et reconstruire des instruments, pratiquer la production studio, le Web design, l’art vidéo et la danse contribue sans doute à s’en rapprocher. Vladiswar NADISHANA est tout cela à la fois, avec un dynamisme qui laisse pantois. Il faut croire qu’il évolue simultanément dans plusieurs dimensions. Cette faculté quasi-chamanique lui a certainement été léguée par des ancêtres de la tradition dont il se revendique, celle des Anciens Kuzhebars. Comment cela, ça ne vous dit rien ?

Kuzhebar Power !

On sait que la Sibérie est un vivier de peuplades ethniques toutes aussi obscures les unes que les autres. On avait entendu parler des Evenks, des Bouriates, des Sakhas…, mais on ne peut pas dire que les Kuzhebar aient fait énormément parler d’eux. Qui sont – ou plutôt – qui étaient-ils vraiment ? Sur le Net, il est quasi impossible d’en savoir plus, autrement que par le site de Vladiswar NADISHANA, qui a consacré quelques pages à la tradition kuzhebar. Les autres pages de son site sont également fleuries de plein d’œuvres plastiques (dessins, sculptures…) émanant de cette tradition aux origines lointaines. NADISHANA anime du reste des séminaires et des workshops visant à faire connaître et partager l’expérience du mode de vie des Anciens Kuzhebars. À l’heure actuelle il semble que seuls Vladiswar NADISHANA et la styliste Julia SURBA soient les porte-paroles du renouveau de cette culture ancestrale a priori perdue dans les abîmes du temps, et dont il ne subsiste que quelques rares traces…

D’après certaines légendes sibériennes, la civilisation kuzhebar serait le berceau de plusieurs groupes ethniques de la région de Krasnoyarsk, en Sibérie du Sud. C’est du reste dans un petit village de cette région, justement nommé Nizhny Kuzhebar, qu’on aurait retrouvé les premiers objets témoins de cette culture, qui remonte à une très ancienne période de l’histoire. Mais la datation s’avère un exercice délicat concernant une tradition dont l’histoire ne semble pas nécessairement s’inscrire dans un déroulement linéaire.

À quel niveau de réalité peut-on donc situer une civilisation dont les membres, nous dit NADISHANA, avaient la possibilité de pouvoir voyager dans le temps et dans l’espace à travers des galeries alternatives du monde réel, comparaient la structure de l’âme humaine à celle d’une cellule animale ou florale, dont la religion était fondée sur l’humour et le rire comme pratique psycho-énergétique et dont l’approche de la mort équivalait à une sorte de réincarnation « à la carte » (choix entre la mort définitive, le changement d’enveloppe corporelle, ou le statut d’immortalité) ?

C’est comme si la perception de la culture des Anciens Kuzhebars ne pouvait s’appréhender qu’à travers le prisme d’un « voyage » chamanique…

Toujours est-il que la démarche artistique de Vladiswar NADISHANA est entièrement imprégnée des préceptes des Anciens Kuzhebars. Tout comme ces derniers pouvaient changer de corps, se transformer à volonté et voyager dans le temps, NADISHANA démultiplie ses talents d’instrumentiste sur plusieurs instruments qu’il a lui-même recréés ou inventés, voyageant et faisant voyager l’auditeur à travers différentes traditions musicales que les Anciens Kuzhebars auraient inspiré ou par lesquelles ils auraient pu être inspirés. À l’opposé de toute muséification, Vladiswar NADISHANA propose une vision renouvelée, énergisée, de la tradition kuzhebar ; il en développe les perspectives à travers une approche essentiellement créative. Tout son art équivaut en quelque sorte à donner une réponse actualisée à la problématique de l’appartenance revendiquée à une culture dont la visibilité fait aujourd’hui défaut.

Instruments du monde… et d’un autre monde

Et puisque la connaissance de l’art kuzhebar est précisément lacunaire et parcellaire, il convient donc de l’enrichir en réinventant ce qui a pu exister. C’est ainsi que Vladiswar NADISHANA a entrepris de reconstruire une quantité d’instruments à cordes, à vents ou de percussions, en se fondant sur les principes de création des Anciens Kuzhebars. Il a ainsi conçu ses propres prototypes de flûtes, kalyuka, fujara, kaval, repensées pour permettre différentes techniques de jeu. Il possède de même de superbes guimbardes (kou xiang chinois, dan moi vietnamien, morsing indien…)

Et comme si ça ne suffisait pas, NADISHANA a également créé de toutes pièces d’autres instruments expérimentaux, en utilisant tout ce qui lui passait entre les mains. C’est ainsi avec des canettes de bières ou une bonbonne d’eau en plastique qu’il a donné naissance à des percussions ou avec un tuyau en plastique flexible qu’il a engendré le « ghost catcher ». Certains sont inspirés par des instruments d’autres cultures, dûment modifiés, comme ce « set » de quatre guimbardes, ou cette guitare-sitar-mandole qui répond au curieux nom de « dzuddahord ». Il est vrai que la plupart des instruments inventés par NADISHANA portent des noms qui sont en soi de vrais poèmes ésotériques : pruzhingum, rablorrum, rod-spring gamelan, plastrimbaphon, banbang, pin-sansa… Et pour chacun d’eux, Vladiswar NADISHANA a élaboré sa propre technique de jeu.

Fort d’un instrumentarium pour le moins vaste et coloré, il peut se permettre toutes les synthèses musicales qui lui viennent à l’esprit, d’autant qu’il a monté son propre studio et laboratoire de recherche créative, le Sound Microsurgery Departement, avec lequel il développe de nouvelles méthodes de travail usant des technologies digitales. Ses musiques explorent ainsi tous les possibles émanant du mélange des traditions et de la fusion ethnojazz. Auteur à ce jour de sept CD solo, Vladiswar NADISHANA s’implique également dans plusieurs groupes, avec 4th RACE, CAPERCAILLIES AT THE THRESHOLD OF ETERNITY, KALIMAT TRIO, RUSSIAN-TUVINIAN KARMA KNOT DUO, NADISUNA DUO…, et collabore avec d’autres formations et artistes, dont ORGAN’X, HADOUK TRIO et Steve SHEHAN en France.

Entretien avec Vladiswar NADISHANA

Tu joues d’une pléthore d’instruments ; certains sont très anciens, d’autres sont de ta création… Comment t’es venue cette passion ? Viens-tu d’une famille de musiciens ?

Vladiswar NADISHANA : Non, ma famille n’est pas du tout musicienne, et n’écoute pas beaucoup de musique non plus. La musique ne circulait pas vraiment chez nous, et encore moins la musique world, ethnique. En Russie, ça ne circulait pas, du moins à cette époque.

Maintenant, c’est devenu un peu plus populaire : musique de guimbarde, musique chamanique, new-age, folk, etc., sont légèrement devenues plus populaires en Russie, mais ce n’était pas le cas il y a encore quelques années.

Passionné de musique en général, j’ai juste commencé par la guitare quand j’avais 19 ans. Et j’ai eu follement envie de découvrir de nouvelles choses ! J’ai réalisé que tout ne passait pas à la télé, sur MTV, ou à la radio, qu’il y avait autre chose…

À Saint-Petersburg, il y avait des petits réseaux de gens qui étaient intéressés par la world music, et qui s’échangeaient des CD – enfin non, des cassettes ! Les CD n’existaient pas encore en Russie… Ces cassettes étaient de mauvaise qualité, mais il y en avait plein contenant des musiques du monde. Il fallait vraiment être passionné, être guidé par l’envie de découvrir autre chose… J’ai donc découvert différentes musiques traditionnelles, des choses plus « fusion » aussi. J’ai de même vu quelques concerts. Il y avait une vie culturelle à Saint-Petersburg. Il était possible d’aller voir du kabuki japonais, écouter du raga indien… Et à Moscou également ! Il y avait principalement deux villes où l’on pouvait aller voir ce genre de concerts, Moscou et Saint-Petersburg. Ça a été le début…

Il y avait quelques musiciens dans ce réseau. Je me souviens d’un groupe qui répétait non loin de chez moi. J’allais souvent les voir. Il jouait une musique bien à lui, mais inspirée par des musiques ethniques. Avec un ami, on a commencé à créer notre propre répertoire. Ce n’était pas forcément très intéressant, mais pour nous c’était nos premiers pas. Il fallait bien commencer.

Flûte harmonique et chasseur de fantômes

Et comment t’es-tu procuré ces vieux instruments ?

VN : Je n’ai pas beaucoup voyagé. Soit je les ai créés, soit on me les a donnés, comme la mandola. On récupérait des choses aussi… À l’époque, en Russie, on ne pouvait guère acheter d’instruments. Pour la première percussion que j’ai faite, il y avait une usine de céramiques qui fabriquait des poteries, et j’ai subtilisé une poterie qui n’était pas achevée – le genre de chose qui est assez risquée ! –, il n’y avait pas encore de peinture dessus. Je l’ai recouverte d’une peau, et j’ai ainsi fait mon premier dumbek. C’est de cette façon qu’on pouvait faire des instruments à ce moment-là.

Sinon, ce sont des instruments que j’ai créé en collaboration avec d’autres personnes, parce que je travaille aussi en tant que promoteur. Je les créé ou je demande à d’autres de les faire, de les modeler pour moi.

As-tu cherché à jouer de ces instruments selon les techniques traditionnelles, ou as-tu au contraire cherché de nouvelles façons d’en jouer ?

VN : Non, je ne prétends pouvoir jouer de ces instruments comme les musiciens traditionnels. Bien sûr, j’en ai écouté et j’ai essayé de faire la même chose, d’acquérir quelques techniques… Mais je n’ai jamais eu la prétention de jouer une quelconque musique traditionnelle. C’est impossible. On doit être né dedans, être initié… Je joue juste ma propre musique.

Donc mon idée a été d’écouter énormément de choses, de les absorber et de créer des choses de mon cru.

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Qu’est-ce qui t’as poussé à créer de nouveaux instruments ? Est-ce parce que certains avaient disparus ?

VN : C’est venu du manque d’instruments en général. Quand on ne peut pas trouver d’instruments, on a intérêt à être créatif, inventif. Comment substituer de nouveaux instruments aux anciens ? Comment fabriquer par exemple une flûte ? Avec quel matériau ? Où trouver ce- lui-ci ? Comment faire les trous ? Quand on se met à penser à tout ça, on peut réaliser plein de choses intéressantes. Je ne savais pas comment on concevait les flûtes. Je pouvais juste deviner.

Par exemple, la kalyuka russe (c’est une flûte harmonique) : J’en joue, mais je n’en ai jamais vu. J’ai juste entendu quelqu’un en jouer. J’ai essayé d’imaginer comment on les fabriquait. J’ai fait des expériences, et une a été convaincante. J’ai créé cet instrument, c’est ma première kalyuka. Après, j’en ai fait plein d’autres, mais je préfère toujours celle-là. Plus tard, j’ai appris que la kalyuka était conçue d’une façon totalement différente de celle à laquelle j’avais pensée ! Mais je préfère la mienne. Elle a un meilleur son, je la maîtrise mieux. Je l’ai faite d’une manière qui me convient mieux techniquement, et ça me permet de faire plus de choses. Tout est affaire d’intuition. C’est comme ça que je fonctionne.

Je vais dans des musées qui possèdent des instruments (il y en a un à Moscou, un à Saint-Petersburgh), j’observe les instruments, je les analyse, j’imagine comment on les fabrique, comment on peut combiner deux instruments en un seul… C’est très intéressant.

As-tu reçu l’enseignement d’un professeur de musique pour jouer de ces instruments ?

VN : J’ai n’ai pas eu la chance d’apprendre de quelqu’un. Il n’y avait guère de gens à l’époque auprès de qui on pouvait apprendre ces musiques. On peut juste deviner comment ces instruments étaient joués. On explore, on essaie de jouer, j’ai créé plein de choses comme ça, par tâtonnements et réflexions, intuition et imagination.

L’héritage russe n’ayant pas été assez préservé, il faut tout créer. Si j’étais né en France, je n’aurais peut-être pas éprouvé ce besoin de jouer d’autant d’instruments, peut-être un ou deux. Mais je voulais jouer ma musique. Et la seule possibilité de le faire était d’apprendre à jouer de tous les instruments. Cette musique que tu as dans la tête, tu ne peux la sortir de toi qu’en procédant ainsi. Sinon, il n’y a personne d’autre pour le faire en Russie. Même maintenant. C’est pour ça aussi que je suis multi- instrumentiste. C’est la seule façon de faire sortir la musique.

Combien d’instruments as-tu créés ?

VN : C’est difficile à dire… Je ne pense pas en avoir véritablement créé de toutes pièces, j’ai plutôt développé certaines choses. Comme cette kalyuka : elle est de ma construction, mais elle est basée sur des modèles déjà existants. La futujara est basée sur la fujara traditionnelle. J’en joue à ma façon, mais cette flûte existait bien avant.

Comme le ghost catcher, c’est un mélange d’arc en bouche et de guitare, avec une planche à bois et deux cordes. On joue les mélodies sur la planche à bois et on se sert de sa bouche pour moduler les sons. C’est un arc en bouche amélioré, si on veut.

Bref, je ne sais pas combien j’en ai faits. Certains sont très rudimentaires, comme les kalimba, et elles ont un son bizarre. Il y en a en Sibérie. D’autres sont plus développées, et donc jouables…. J’utilise aussi des samples de certains instruments. Cela représente un vaste champ de création. On peut créer des objets, les sampler et créer des séquences électroniquement, comme pour la peinture. (Car je suis aussi peintre.) J’utilise les séquencers musicaux Cubase. Avec ça, on peut « peindre » la musique.

Ton activité musicale serait donc également liée à la peinture…

VN : Liée à un ordinateur, surtout. On peut peindre des séquences. J’utilise donc des instruments acoustiques et des instruments virtuels, samplés, créés par moi via des séquencers, et je dessine des séquences.

Tu n’es donc pas seulement un artiste multi-instrumentiste, mais aussi multimédia !

VN : Oui, c’est une sorte de création multimédia.

Tu es aussi danseur…

VN : Oui, je danse, mais je ne suis pas professionnel ; je fais ça pour le fun. Cela dit, en dansant, j’essaye de recréer les rituels de la culture à laquelle j’appartiens, celle de la minorité ethnique kuzhebar, qui n’existe quasiment plus, pour plusieurs raisons. Il y a plein de minorités ethniques en Russie qui ont disparu ou ont été assimilées. La minorité kuzhebar en est une. Avec une autre artiste, nous essayons de la préserver en la recréant et en la développant pour la montrer au monde.

À la recherche d’une civilisation disparue

Parlons donc de ce peuple kuzhebar. Étaient-ils des natifs de Sibérie ?

VN : Oui, oui, comme beaucoup d’autres minorités du Sud de la Sibérie. Cette minorité était dans la même région que Touva et la Khakhassie. C’est une grande région, et il n’y a pas eu que des Touvains, des Khakasses ou des Altaïens. Il y en a eu d’autres, certains ont complètement disparu… Nous venons de cette région et essayons d’en garder la tradition vivante.

As-tu pu retrouver des traces de cette culture ?

VN : Oui, certains descendants sont encore vivants. Ils connaissent des légendes, des formes artistiques, même s’ils ne savent plus ce qu’elles veulent dire exactement. Ils les reproduisent sans en comprendre le sens. Ce sont des grands-pères et des grands-mères qui ont su le sens de tout ça, mais l’ont oublié. C’est l’une des causes de l’expansion du communisme. Durant la période communiste, le chamanisme était interdit. Et l’autre cause est… la vodka ! Elle a été très dangereuse pour ces peuples. Ils se sont abîmés la santé et les facultés mentales avec ça ! C’est le problème principal de toute cette région. Il n’y a pas que les Kuzhebar ; les Tafalar ont presque disparu aussi après s’être adonnés à la vodka…

Et c’est du reste le problème principal auquel ont été confronté d’autres peuples, comme les Amérindiens. L’alcoolisme a fait des ravages chez eux également…

VN : Exactement, c’est le même problème. C’est comme ça… Les Kuzhebar avaient pourtant une culture très intéressante, une grande mythologie, des formes artistiques uniques. Nous essayons de les promouvoir. Certains descendants ont préservé des traces de ces formes artistiques. La musique par contre s’est complètement perdue. On ne sait pas comment elle sonnait. Il n’y a que des instruments… Cet arc à bouche, par exemple, est un instrument kuzhebar. On l’a juste amélioré.

Y a-t-il d’autres instruments kuzhebar ?

VN : Il y a eu une sorte de violon, des types de flûtes à biseau… des instruments à cordes dont je ne connais pas le nom mais qui se sont répandus dans la région. Ceux que je joue sont assez proches des modèles d’origine, ils proviennent de Touva, de Khakassie… Ils portent d’autres noms, mais ce sont globalement les mêmes.

As-tu pu retrouver des traces de chant kuzhebar ?

VN : Non, malheureusement. Les instruments sont des choses qui existent ou ont existé physiquement, il est possible de les retrouver ou de les reproduire. Par contre, le chant, si on ne l’enregistre pas, disparaît à tout jamais. En Russie, on ne peut plus trouver de folklore russe à proprement parler. Les enregistrements qui ont été faits dans les années 1960 et 1970 l’ont été sur des cassettes qui, maintenant, ne tournent plus, car trop abîmées. En Russie, on n’a pas cru bon de préserver ces archives. Ce problème n’atteint pas seulement les anciennes ethnies comme les Kuzhebar, et ce qu’on entend aujourd’hui à la radio, ce n’est pas du vrai folklore, il est faussé.

Le vrai folklore est dans ces cassettes qui sont peut-être encore audibles quelque part, mais ne sont pas accessibles. Même dans les villages, maintenant, les chanteurs sont influencés par la radio… Ils ne savent plus chanter selon les anciennes échelles tempérées. J’ai pu faire la différence parce que j’ai réussi à écouter quelques archives, et la façon de chanter maintenant est complètement différente.

Et il n’y a pas eu assez de monde qui s’est préoccupé de préserver ces anciennes pratiques…

VN : Le problème est que la politique menée en Russie a fait usage du folklore à titre de propagande. On a ainsi conçu un folklore édulcoré, ce qui est la meilleure façon de tuer une pratique folklorique. De nos jours, les gens se méfient du folklore, ils ne veulent plus être assimilés ou s’identifier à cela, à ces chansons communistes… Maintenant, il y a plein de folklore édulcoré en Russie, du genre chansons accompagnées par des balalaika, des bayan, ce genre de conneries…

…À la différence des Touvains et des Altaïens, par exemple, qui se sont remis à valoriser leur héritage culturel…

VN : Oui, les Touvains ont bien récupéré leur folklore, il y a eu comme une renaissance. J’ai vu plein de jeunes gens assister à des festivals de chant de gorge et qui en sont ressortis enchantés, ébahis. Ça fait partie d’une politique de conservation et de développement de l’héritage folk par le gouvernement touvain. Les Khakasses s’y sont mis également. Certains groupes sont de même encouragés ou sponsorisés par des instances gouvernementales.

Pour une indépendance artistique

Qu’est-ce que le Sound Microsurgery Department que tu as fondé ?

VN : C’est le nom de mon studio. C’est aussi une sorte de laboratoire. Il fallait un nom pour définir certaines activités. C’est aussi le nom de mon label. J’enregistre mes albums dans ce studio et ils sortent sur ce label. Je fais tout par moi-même : production d’instruments, CD, jaquettes, vidéoprojections, distribution, site web… Toutes les étapes, de la pratique musicale à la vente du produit final, sont assurées par nous. C’est la seule façon en Russie de produire : tout faire par soi-même.

As-tu créé ton propre label parce que tu n’en a pas trouvé pour te produire ?

VN : Il y a de cela en partie. Ça devient très difficile de trouver un label intéressé par ce genre de musique. Et je trouve de toute façon que ça devient inutile de passer par un label. L’industrie musicale ayant les problèmes que l’on sait, il vaut mieux trouver de nouvelles voies pour assurer la distribution, se constituer un public… Il y a tellement de possibilités nouvelles, avec Myspace, You- tube… J’ai de la chance de ne pas avoir besoin de maison de disques !

Il y a quinze ou vingt ans, je n’aurais peut-être pas pu monter tout ça, les technologies internet n’étaient pas assez développées. Je n’aurais peut-être pas pu faire cette musique. Mais de toute façon, à cette époque, j’en étais encore à apprendre à jouer des instruments. Et on enregistrait encore avec des magnétophones… On mixait deux magnétos avec une table de mixage, la qualité était horrible…

Quand mon premier ordinateur est arrivé, j’ai eu l’impression de passer de l’âge de pierre à un âge futuriste ! C’était une révolution, un saut énorme ! Quand j’ai eu mon premier ordinateur, je me suis promis de ne plus utiliser de magnétophone ni de cassettes, jamais… J’ai enregistré mon premier CD un an après.

Avec un ordinateur, on peut non seulement enregistrer et fabriquer des CD, mais aussi assurer la promotion, la distribution, la vente… C’est une situation de travail idéale pour moi.

Et tu n’a pas besoin de passer par des intermédiaires qui te disent quel genre de disque il faut faire, comment le produire, etc.

VN : Oui, on échappe de plus à toute ces personnes qui font tout à ta place. Et tu n’a plus à te préoccuper du coût de l’équipement. Steve SHEHAN m’a dit qu’il lui a fallu quatre ans pour se payer son propre matériel d’enregistrement. Maintenant, c’est moins cher. Bien sûr, Internet créé d’autres problèmes. Il y a des musiques foireuses, copiées-collées… Mais je m’en fous, je peux créer, je n’ai pas besoin de maison de disques, de louer un studio, je peux tout faire par moi-même. Tout au plus ai-je besoin de musiciens de temps à autre…

Rencontres avec des groupes remarquables

À ce sujet, quand on écoute certains de tes albums, on a vraiment l’impression d’entendre un groupe jouer. N’as-tu pas envie de faire jouer ta musique par un groupe ?

VN : Bien sûr, mais c’est finalement encore moins facile que de m’enregistrer moi-même. J’ai une idée très claire de la manière dont doit être jouée cette musique. Ce n’est pas facile de trouver les musiciens qui peuvent le faire. Ce n’est pas du 4/4. Parfois, ce sont des constructions rythmiques très complexes, des contrepoints, des polyrythmes… Mon idée du groupe est qu’il devrait inclure des musiciens qui par- tagent la même implication dans la musique que moi, la même passion. Ce n’est pas facile à trouver.

Cela dit, tu joues avec un groupe, 4th RACE…

VN : Oui, mais nous n’essayons pas de jouer la musique de mes CD. C’est une autre démarche… Ce qui n’empêche pas que c’est encore plus compliqué !

En tout cas, je cherche les musiciens qui seraient aptes à jouer la musique incluse dans mes CD sans compromission. Ce n’est pas du tout cuit !

Qui compose au sein de 4th RACE ?

VN : Le bassiste et moi. Et dans ce cas, mes compositions sont différentes de celles de mes CD solo.

Tu as en outre collaboré avec plusieurs autres groupes et artistes. En France, tu as joué avec les chanteuses d’ORGAN’X. Comment les as-tu rencontrées ?

VN : Elles m’ont trouvé sur Myspace. C’est un étonnant vecteur de rencontres, ce Myspace ! J’ai fait la connaissance de tas de gens par ce biais. Elles m’ont vu à Berlin et m’ont invité en France. Elles sont très sympathiques, très ouvertes, elles font une musique très intéressante, et nous avons des conceptions analogues sur la fusion, et nous avons décidé de joindre nos forces.

C’est la première fois que tu joues avec des chanteuses ou des chanteurs ?

VN : Non, j’avais déjà joué avec un chanteur en Russie… Il y a aussi des chanteuses sur mon dernier CD, sur l’hymne kuzhebar. Plus quelques side-projects…

Dans ORGAN’X, il arrive que les voix soient un peu trafiquées ou retravaillées par un procédé électronique. Avais-tu déjà expérimenté cela ?

VN : Elles utilisent un processeur, en effet. C’était assez nouveau pour moi. Je n’avais jamais entendu parler de cette machine. Elles l’utilisent de fort belle façon. La voix devient une texture instrumentale, c’est intéressant…

Tu as également déjà joué avec le HADOUK TRIO…

VN : C’est ça. L’histoire a commencé en Russie, quand j’ai trouvé une cassette avec deux CD de Steve SHEHAN, Arrows et Indigo Dreams. J’ai été littéralement transporté par ce que j’avais écouté ! Ces CD m’ont beaucoup influencé à l’époque. Ils étaient vraiment le fruit d’un seul homme (à la composition comme à la production) et le reflet d’un univers vraiment unique. Il a vraiment créé une musique nouvelle, fondée sur d’anciennes sonorités, des atmosphères ethniques, des éléments plus jazzy, des samples aussi. Étonnant ! Personne n’avait fait ça ! Il m’a beaucoup influencé et m’a encouragé à assurer ma propre production (CD, studio…), de tout faire par moi-même. J’ai beaucoup appris de lui, mais je n’ai jamais cherché à le copier. J’ai créé mon propre univers, mais c’est clair qu’il est l’un de mes maîtres. Il y a dix ans, j’ai énormément appris avec cette cassette contenant deux de ses CD, que j’ai écoutés très profondément.

Et puis, un jour, la productrice de Steve SHEHAN a trouvé mon Myspace (sur lequel je mentionne Steve comme l’une de mes plus fortes influences) en faisant une recherche sur son nom. Elle a fait écouter ma musique à Steve, qui m’a proposé de jouer avec le HADOUK TRIO.

Tu ne l’avais donc jamais rencontré auparavant ?

VN : Non, ça a vraiment été de la chance ! Je me sens assez privilégié d’avoir pu jouer avec ce musicien qui est de plus une personnalité extraordinaire. C’est plus tard que j’ai découvert ce qu’il faisait avec le HADOUK TRIO, alors que je cherchais des infos sur sa carrière sur Internet. J’ai ainsi rencontré Loy (EHRLICH) et Didier (MALHERBE), ce fut aussi une expérience marquante puisqu’ils sont également ingénieurs du son. Didier m’a montré sa technique au doudouk, et c’est fantastique ! Loy est aussi extraordinaire. C’est vraiment un trio de génies, et qui a de plus son propre son.

Je trouve par ailleurs que vous avez beaucoup de choses en commun, notamment une inspiration parallèle, une approche similaire… Didier, par exemple, a repensé le jeu du doudouk, dont il ne joue pas de manière traditionnelle. C’est pareil pour toi avec les instruments que tu as (ré)inventés…

VN : C’est vrai… J’ai moi-même fait des recherches concernant la flûte kaval hybride, que j’ai développée avec un ami. J’en ai joué au Satellit’Café. Elle permet de combiner les techniques de trois flûtes : la kaval turque, la flûte ney persane et la khobrakh khakasse.

Cet instrument est un vrai challenge pour moi. J’ai passé un an à le concevoir. Mais il ouvre tellement de perspectives… Il donne des possibilités étonnantes qu’on n’a pas avec les autres flûtes, en terme d’échelles, de timbres. C’est vraiment MON instrument. Il en combine plusieurs en un seul.

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Du chant de gorge au chant félin

Tu as déjà à ton actif un bon paquet de disques solo…

VN : Sept. Le premier date de 1999.

Ça fait donc sept CD en neuf ans…

VN : Oui.. encore que je me souviens avoir enregistré avec un trompettiste, c’était en 1998. Mais c’était un enregistrement acoustique, sans ordinateur. C’est ensuite que j’ai fait mes propres CD, en 1999.

Sur chaque CD, tu développes différentes idées, ce n’est jamais exactement la même musique. Il y en a un consacré aux guimbardes, un autre destiné à éveiller la conscience et les chakras, un autre encore que tu as fait avec un musicien touvain, le dernier est consacré à la musique traditionnelle kuzhebar… Tu fais en quelque sorte des CD thématiques ?

VN : On peut dire ça… Ils sont différents. Il y en a un, comme tu as dit, qui a été enregistré avec un musicien de Touva. L’idée était de fusionner avec la musique touvaine, ce qui n’avait jamais été fait. La raison en est que les Touvains ne sont pas très ouverts. C’est difficile de travailler avec eux sur des projets de fusion. Je ne sais pas bien pourquoi… Ils ne sont pas très ouverts aux expériences.

Tout le monde connaît HUUN-HUUR-TU, par exemple, et d’autres choses traditionnelles, mais c’est à peu près tout. Il n’y a pas de musique de fusion touvaine.

Il y a quand même des groupes qui ne font pas strictement du traditionnel et qui font dans l’expérimental, comme YAT-KHA ou BIOSINTES…

VN : YAT-KHA n’est pas ce que j’appellerais un groupe expérimental ou de fusion. C’est plutôt rock.

En revanche, Sainkho NAMTCHYLAK a versé dans l’expérimental, l’improvisation…

VN : Sainkho, oui. Mais curieusement, elle ne paraît pas très appréciée à Touva même. Elle passe pour une Européenne. De même, je ne suis pas convaincu qu’Albert KUVEZIN, de YAT-KHA, soit strictement Touvain, il a aussi des origines khakasses. Mais il a été assez intelligent pour apporter quelque chose de neuf à la musique de Touva. Il pratique le chant trad’ touvain, YAT-KHA est son projet, mais il n’est pas complètement Touvain. Et je sais que c’est dur de convaincre des Touvains de jouer avec toi quand tu n’es pas Touvain.

Par exemple, le professeur de chant du musicien et chanteur touvain avec qui j’ai fait ce CD était très fâché qu’il ait fait ce disque avec moi. Très en colère ! « Tu n’a pas le droit de faire ça sans permission ! » lui a-t-il dit. C’est un exemple parmi d’autres… On dirait qu’ils veulent contrôler leur musique traditionnelle.

Connais-tu ce que fait Gendos CHAMZYRYN ?

VN : Oui, je l’ai vu en concert à Touva. Lui et son groupe GEN-DOS jouaient une sorte de pop électronique, à mon sens.

Il a fait aussi des choses plus expérimentales… Sinon, tu as consacré un disque exclusivement à la guimbarde…

VN : Je l’ai fait parce que plusieurs personnes me posaient des questions sur la guimbarde, comment obtenir tel son, etc. J’ai donc fait ce CD avec toutes mes guimbardes, dont je ne joue pas toujours sur mes autres CD.

Et j’ai fait un CD basé sur la conception de l’origami. Je joue toutes les pistes. Sur chaque morceau, je joue plein de parties qui sont « overdubbées » de façon à les faire sonner comme une musique jouée par un groupe.

C’est ainsi que tu as conçu ton dernier CD, The Traditional Music of Ancient Kuzhebar, où tu joues de tout ?

VN : Oui, à part sur deux morceaux, où j’ai fait appel à des invités. Ça m’a pris un an et demi pour réaliser ces albums. La production studio n’est jamais facile à finaliser. Pour le CD sur les guimbardes, j’ai juste sélectionné des prises sur lesquelles je joue live, elles sont tirées de concerts. C’était plus facile. Je songe à changer ma façon de produire pour la rendre plus aisée. Un an consacré à faire un CD, ici, c’est impossible. Il me faut être plus flexible. La production est toujours complexe…

Sur ton dernier album, tu as également composé avec un chat…

VN : Oui. En Russie, ce morceau est devenu célèbre, rien qu’en circulant sur Internet… Les gens me connaissent par ce morceau, grâce à ce chat… qui a disparu depuis.

Mais la plupart des gens qui connaissent ce morceau ne savent pas ce que je fais par ailleurs, ne savent pas que je joue de plusieurs instruments. Ils ne me connaissent qu’en tant que compositeur de Kuzhebar Traditional Cat’s Love Song. C’est ainsi…

En même temps, c’est le genre de morceau qui peut plaire à beaucoup de gens, des jeunes aux plus âgés, il est destiné à devenir populaire. Mon intention n’était pas de faire une parodie ou une imitation… Il s’agissait vraiment de faire chanter un chat ! Et il a fait ça très bien !

Une fois, j’enregistrais en studio avec Cubase, mon chat était là, et des gens sont entrés avec un autre chat, et les deux félins se sont mis à se battre ! (rires) J’ai branché mon micro près d’eux et je les ai enregistrés. Ils se sont battus pendant quelques minutes, et ils se sont barrés ! Ça a été fantastique d’avoir pu enregistrer ça ! C’est comme ça que j’ai décidé de faire une chanson avec mon chat…

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C’est un genre différent de « throat-singing » (chant de gorge), du « throat-screaming » en quelque sorte !

VN : Oui, ce fut en tout cas quelque chose de spontané. J’ai eu la chance d’être dans le studio à ce moment, avec mon ordinateur allumé, et j’étais en train d’enregistrer. Il n’aurait pas fallu que je m’absente à ce moment. Ça a duré deux minutes. Si tu les loupes, elles disparaissent à jamais… Tu ne peux pas forcer ces chats à se remettre à se battre et à miauler rien que pour les enregistrer.

Sinon, tous les morceaux de cet album sont donc inspirés par la tradition kuzhebar ?

VN : Oui, on peut dire qu’ils sont inspirés par l’idée de la redécouverte de la culture kuzhebar. Selon les légendes, les Kuzhebar étaient des gens très ouverts d’esprit, très créatifs. Ils ont beaucoup voyagé et ont absorbé plein d’idées. La théorie de la « 4th Race » (Quatrième Race) vient aussi d’une légende. Les gens qui connaissent ces légendes ont leur idée de ce qu’était cette 4e Race, qui n’existe plus sur Terre. Maintenant, on en est à la 5e Race, les humains actuels sont de la 5e Race. Les peuples de la 4e Race étaient très avancés. Le concept du CD est donc d’absorber plein de choses, comme les peuples de la 4e Race le faisaient. Et créer quelque chose de nouveau basé sur ces idées.

C’est ce qui explique qu’on trouve dans ta musique des influences diverses, indiennes, arabes, bulgares, russes, africaines, etc.

VN : Oui, oui. Il y a plein d’influences, sans qu’une soit prédominante. C’est avant tout ma propre création. L’idée est de trouver le dénominateur commun entre toutes ces traditions. Et de trouver quelque chose de nouveau, pas faire de la copie. Il y a trop de copier-coller de nos jours. Tout le monde copie ou essaye de ressembler à… Du coup, il n’y a plus rien de très original. C’est dur de trouver quelque chose de neuf.

Mon idée est vraiment de créer quelque chose de nouveau, pas d’être la copie de quelque chose, tout en intégrant ces expériences de musiques anciennes et la qualité de leurs instruments. Pas seulement d’ajouter un stupide « beat » électronique tiré d’un sampler CD et de le copier-coller. C’est ça qui est considéré comme musique moderne de nos jours : prendre une boucle d’un sampler CD, le copier-coller et ajouter du synthé par-dessus ! En fait, tout ça, c’est de la supercherie ! Je veux éviter ce genre de choses.

Site : www.nadishana.com

Propos recueillis par Stéphane Fougère –
Photos : Sylvie Hamon et Stéphane Fougère

Discographie Vladiswar NADISHANA :

Takku Ta Tei (2000, Sound Microsurgery Department)
Penetration into Substance (2001, Sound Microsurgery Department)
Russian-Tuvinian Karma Knot (2003, Sound Microsurgery Department)
The Traditional Music of Ancient Kuzhebar Aboriginies (2004, Sound Microsurgery Department)
Live in Izhevsk (2004, Sound Microsurgery Department)
Move Your Chakra! (2005, Sound Microsurgery Department)
Innovative Jew’s Harp (2008, Sound Microsurgery Department)
Zero Density (Web Compilation) (2016, Sound Microsurgery Department)

Vladiswar NADISHANA & YOUL :
Phonic Duet (1998, Sound Microsurgery Department)

NADISHANA / GORELIK :
Asymmetric Beauty (2011, Sound Microsurgery Department)

NADISHANA TRIO (avec Armin METZ et Steve SHEHAN) :
Far&Near (2011, Sound Microsurgery Department)

KUCKHERMANN – NADISHANA :
Live at Moscow Hang Festival (2012, Sound Microsurgery Department)

Vladiswar NADISHANA est également invité sur l’album Hang with You de Steve SHEHAN (2013, Naïve)

(Article original publié dans
ETHNOTEMPOS n° 43 – été 2009
– discographie mise à jour en 2023)

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