Youri DEFRANCE au Centre Élément à Paris, juin 2017

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YOURI DEFRANCE

au Centre Élément à Paris, 16 juin 2017

De retour avec un album fraîchement paru en CD et en LP, Ongod, l’artiste champenois Youri DEFRANCE se produisait à Paris, dans un lieu qui n’est pas à la base une salle de spectacle. C’est en effet dans un de ces antres intimistes dédiés au bien-être et au ressourcement, le Centre Élément, sorte de cocon zen niché en plein cœur de de la capitale, que notre « bluesman ethnique » s’est produit, pour ce qui était annoncé comme un ciné-concert, avec un film racontant son voyage dans la taïga, où il a rencontré une chamane de la tribu tsaatane, ENKHETUYA.

Le choix d’un tel lieu n’était ni anodin, ni incongru, quand on sait que Youri DEFRANCE approche son art comme une méditation sonore, et que les instruments dont il joue – notamment la vièle à tête de cheval mongole, la morin-khuur – ont pour lui une fonction quasi-thérapeutique. C’est donc devant un public en grande partie allongé sur de confortables coussins ou tapis de sol qu’il a entamé son concert, dont la première partie était vouée uniquement à l’immersion dans le son, sans support visuel. Youri a plongé son auditoire dans une expédition sonique méditative en plusieurs mouvements, commencée à la guimbarde, poursuivie à la morin-khuur, puis à la guitare acoustique, puis de nouveau à la guimbarde, en usant de ce chant rauque et éraillé, nourri de techniques de chant diphonique, avec ce sens aigu de l’envoûtement par les cordes (vocales et instrumentales).

Enveloppante et recueillie par endroits, heurtée et secouante à d’autres, appelant les esprits (ongod) enfouis en avalant le vent et en mordant la roche, la performance de Youri allait bien au-delà d’une séance de relaxation new-age et s’apparentait plutôt à une mise en condition introspective pour ce qui allait suivre. Le silence a régné dans la salle pendant de longues minutes à la fin de cette performance, le public n’étant plus en état de revenir à sa condition matérielle aléatoire. Il était aux portes d’un autre monde, celui du rite chamanique sibérien, qu’il allait bientôt découvrir en images.

Passant du noir et blanc à la couleur, filmé en bonne partie caméra à l’épaule ou au poing, mais avec une belle qualité d’image, le documentaire nous a introduit au plus près d’une cérémonie chamanique menée par la Mongole ENKHETUYA et nous a trimbalé, à pied comme à moto, dans les immensités primitives des plateaux mongols, avec leurs horizons burinés, leurs couleurs crues, leur soleil impitoyable, leur humidité pénétrante, leurs lacs à fond perdu, leurs crépuscules boisés… Contrairement à toute attente, la seconde performance musicale de Youri DEFRANCE avait délesté toute résonance acoustique et « ethnisante » et fut accomplie à la seule guitare résophonique, convoquant les émanations d’un blues primitif, râpeux juste ce qu’il faut, à se fondre dans cet univers incantatoire aux émanations viscérales.

Bousculant les codes et les attentes liés d’ordinaire à la « prestation en concert », Youri DEFRANCE a partagé avec son public un moment de communion cathartique, en sons et en images porteurs d’une vibration instinctive, tel un humble passeur, un guide reliant les mondes physique et psychique.

Stéphane Fougère

Photos : Sylvie Hamon

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