Electric TAG-Land, The MAD SHEER KHAN Experience
Né d’une mère algérienne et d’un père persan, Mahamad HADI, devenu MAD SHEER KHAN, a le métissage dans le sang autant que dans le son. Son parcours artistique est de celui qui passe outre les frontières. Il a commencé dans les années 1970 par fonder le groupe RAHMANN, qui jouait un jazz-rock progressif ambitieux et bigarré. Par la suite, alors qu’il travaillait en Angleterre avec l’égérie du VELVET UNDERGROUND, NICO, MAD a été reconnu pour ses talents musicaux, au point d’être nommé par un magazine anglais comme l’un des dix meilleurs guitaristes au monde. Son apparence n’est pas non plus passée inaperçue. Il est vrai qu’à cette époque, dans le milieu pop-rock, on ne croisait guère de guitariste coiffé d’un turban !
Producteur de nombreux albums, MAD a croisé sur sa route des artistes aussi différents que SAPHO, Keziah JONES, Bapi DAS BAUL (BAUL BISHWA/SENSES), Nina HAGEN, Didier LOCKWOOD, Jean-Louis AUBERT ou encore L. SUBRAMANIAM. Il s’est de même pris de passion pour diverses musiques traditionnelles : la musique persane, celle des Gwanas marocains, celle des Bauls du Bengale et a étudié le dilruba – violon du Rajasthan de quelque 24 cordes conçu comme une synthèse du sitar et du sarangi – auprès du maître Ekram KHAN, un disciple de Sultan KHAN.
Après avoir fondé HAREM, un groupe constitué de trois musiciennes et dont la musique mêle sons électroniques et acoustiques, MAD SHEER KHAN l’artiste a enfin révélé son talent en soliste. Il a ainsi enregistré en 1996 l’album Talisman, dans lequel il assure tous les instruments (dilruba, santur, saz, sitar, rebab afghan, harmonium et claviers). Après avoir mis à l’honneur les minorités ethniques dans 1001 Nights (dans lequel interviennent sept chanteuses de cultures différentes, ainsi que le joueur de oud algérien ALLA et le violoniste indien L. SUBRAMANIAM), puis l’Algérie dans Mahjuba (dédié à sa mère disparue) il a transposé et ressuscité l’univers sonore de Jimi HENDRIX dans son dernier album en date, [Samarkand Hotel], avec le répertoire duquel il tourne dans plusieurs pays depuis quatre ans.
Sur scène, MAD est accompagné par un batteur cubain (Sergio L. RUFFIN), un joueur de tablas (Anand KUMAR) et une organiste (CELIA), et joue lui-même d’un dilruba qui restitue toutes les particularités sonores de la fameuse guitare électrique du « Voodoo Chile », avec wha-wha et distorsion, générant ainsi une transe orientalo-psychédélique d’un nouveau genre.
Cette démarche consistant à piloter l’électronique par des instruments acoustiques traditionnels relève du TAG (pour « Tradition Avant-Garde »). Ce mouvement initié par MAD SHEER KHAN a pour ambition de « transposer des instruments traditionnels en les décalant dans une autre culture » et « traduit l’idée d’une immigration réussie, intégrant son environnement en respectant sa forme » (sic). Dans le TAG, l’homme conduit la machine (et non l’inverse) ; tradition et technologie se combinent au lieu de s’affronter et subliment une world music unilatérale pour façonner une dimension artistique portée par une vision philosophique et sociale.
Pour ETHNOTEMPOS / RYTHMES CROISÉS, MAD SHEER KHAN évoque son rapport à HENDRIX, à la world music, à la technologie et à la tradition, afin de mieux faire ressortir l’essence du TAG. Rencontre avec un nomade alchimiste doublé d’un chamane électrique.
Entretien avec MAD SHEER KHAN
Comment avez-vous découvert HENDRIX ?
MAD SHEER KHAN : J’avais douze ans quand j’ai découvert pour la première fois HENDRIX. Il est mort très tôt, un an après. Mais ça a été à la fois un choc dans ce qu’il y a de plus élévateur, quelque chose qui vous fait monter tout de suite, qui transporte.
Pour moi, il y a eu une rencontre très profonde et j’ai découvert par la suite qu’en fait, de par son métissage, je partageais ce mélange de cultures du fait qu’il avait une mère cherokee et un père d’origine africaine, moi qui ait une mère africaine-algérienne et un père persan. Moi, je venais d’une culture orientale traditionnelle pour aller vers l’urbanité et lui est parti de son urbanité pour repartir au Maroc, jouer avec des Gnawas et découvrir ses origines africaines. La première fois que je l’ai écouté, j’ai cru que c’était un musicien oriental qui jouait et qui avait pris une guitare électrique. C’est comme ça que je l’ai entendu : c’était très rythmique et sa manière d’aborder le blues était pour moi différente. Il y avait des cycles, des façons de faire tourner les phrases qui étaient très proches du jeu du luth arabe, très proches du guembri aussi.
Donc j’ai senti cette dimension africaine en lui et en même temps, cet esprit de toujours rechercher le son. Il faut se rappeler que, pour son premier album, la maison de disques avait écrit sur la pochette du disque « nous ne sommes pas responsables du son de cet album », parce que c’était tellement nouveau, cette façon de faire distorsionner volontairement les choses. On a toujours cherché à éviter ça.
À l’époque, on cherchait la pureté du son. Et justement, quand on écoute des sons naturels, de l’eau qui s’écoule d’une cascade, des vagues ou les éclairs, il y a des phasing, des distorsions naturelles, il y a des pieds qui cognent les rochers. Je suis très attentif à tous ces sons qu’on a traduit par des amplis, qui pour moi sont vraiment très proches de la nature. Quand vous prenez un tube et mettez de l’eau à l’intérieur, vous écoutez et vous entendez les plus beaux phasing qu’on faisait dans les années 1970. Je trouve qu’il y a un univers à la fois naturel et urbain chez HENDRIX, une dimension pacifiste et antiraciste qui est très importante parce que, en tant que musicien noir, il a fait le bon choix de jouer avec deux musiciens blancs, à une époque où le problème du racisme était très présent aux États-Unis avec Malcom X, avec le révérend Martin Luther KING. Et donc pour moi, dans ma rencontre avec HENDRIX, c’était symbolique.
Et puis quand j’étais jeune, ma mère écoutait Oum KALTHOUM très souvent et Farid EL ATRACHE sur les radios qu’on captait du Caire, et étonnamment des fois les STONES et les BEATLES venaient se mélanger avec les ondes et on avait une espèce de mix naturel qui arrivait et je trouvais ça fabuleux d’entendre des accords de guitare et des rythmiques de Ringo STARR en plein milieu des chansons d’Oum KALTHOUM. Donc, pour moi, ce mélange c’est un peu aussi mon enfance, c’est-à-dire le fait d’associer des instruments traditionnels avec une culture urbaine, qui est celle du rock ; c’est une chose encore une fois qui est très naturelle. Et j’ai envie de l’exprimer tout en respectant l’endroit d’où je viens, comme la forme de mon instrument et la manière d’en jouer qui reste très traditionnelle, très classique ; mais à partir du capteur, la résonance que je lui donne est très urbaine. Donc, en fait, il s’agit de respecter ses racines et rester soi-même, et s’ouvrir aux autres cultures en s’immergeant à l’intérieur d’elles. Ces dimensions sont très importantes pour moi.
L’instrument de Jimi HENDRIX a été la guitare. Ça a été votre instrument aussi pendant longtemps ?
MSK : Ça l’est toujours. Comme beaucoup de musiciens qui aiment le son plus que l’instrument, et j’en connais beaucoup, je suis multi-instrumentiste, et chaque fois que je découvre un instrument, j’ai beaucoup de facilités à communiquer avec lui et beaucoup de désir aussi de le jouer. Donc j’ai joué du santour, du rubab, du setar, du piano classique, de la guitare électrique. Je me suis intéressé à toutes sortes de sons et d’instruments venant essentiellement de mes régions : le mandole arabe, algérien pour la musique chaabi ; j’ai étudié tout ça, je l’ai pratiqué. J’ai aussi fait des bals traditionnels. La guitare est un instrument que j’adore parce que ce sont des Gitans qui m’ont appris à en jouer, et j’ai fait à une certaine époque, de façon alimentaire comme beaucoup de mes amis, quand j’avais 16-17 ans, des bals traditionnels français. J’ai joué des paso doble, des tangos, ce genre de musiques, à la guitare mais un peu à la façon gitane. J’ai joué avec beaucoup d’accordéonistes et je trouve justement qu’il y a, dans la musique française, un tel rassemblement de différentes cultures pour le tango argentin, le paso doble espagnol, les valses autrichiennes qu’on a repris façon musette, Le Beau Danube bleu et toutes ces choses.
Je trouve que la France est un pays fabuleux parce qu’elle a réussi – là où, je pense, l’Angleterre et les États-Unis ont moins réussi – à préserver les rencontres entre les gens. Il y a des rues qui appartiennent peut-être à des cultures plus qu’à d’autres, mais pas des quartiers enfermés. Les gens communiquent entre eux. Quand j’étais enfant, deux étages en-dessous, il y avait une Sénégalaise, mon voisin du dessus était un Juif Pied-Noir, plus haut on avait un Chinois. Je ne pense pas qu’aux États-Unis, il y ait ce genre de chance justement de communiquer entre les gens. Mes amis d’enfance étaient tous de ces cultures-là et c’est toujours mon désir de rassembler, alors que je deviens adulte et que je découvre les différentes politiques, les intrigues commerciales qui nous dépassent.
Mon batteur est un Juif de Cuba, ce qui n’est pas commun, ma femme est française et elle s’associe à différentes pensées spirituelles et quelquefois anarchistes, selon ce que le monde lui montre. Et donc je crois que c’est cette envie que j’ai de rassembler, d’associer et de montrer qu’il y a d’autres chemins pour faire se rencontrer les gens que la guerre. On peut vraiment exprimer son animalité s’il faut le faire à l’intérieur des instruments de musique, à l’intérieur des rythmes. C’est tellement mieux !
L’Empreinte du TAG
Justement, cette volonté de rassembler, je suppose qu’elle est à l’origine du TAG (tradition avant-garde). Apparemment, c’est une idée que vous avez mise en pratique depuis déjà longtemps, à l’époque du groupe RAHMANN ?
MSK : Oui, bien sûr. RAHMANN était un groupe « TAG » puisqu’on mélangeait des instruments traditionnels comme le oud, des instruments plus « de laboratoire » comme les premières guitares synthétiseurs Roland GR500, qui ressemblaient à de gros robots, et que j’ai fait défretter complètement pour avoir le manche du oud. Donc déjà, il y avait cette démarche de faire se rencontrer des sons traditionnels et l’électronique de pointe de l’époque, puisque maintenant le MIDI a bien évolué. Mais justement, je trouve qu’il y a dans des groupes comme WEATHER REPORT, comme en France il y avait MAGMA, une forme de recherche pour associer des instruments de tradition européenne ou africaine, ou plus sud-américaine pour WEATHER REPORT, et une façon de jouer. Et je trouve que beaucoup de musiques comme la bossa nova, comme le jazz, ont réussi ces métissages de cultures et sont devenues des phares actuellement pour beaucoup de continents. Ce que je souhaite au TAG, c’est un peu de devenir ça.
Mais pour moi, le TAG, à la différence des autres musiques pratiquées, ce n’est pas un rythme. Parce que, quand on parle de musique, on parle davantage du rythme que de la mélodie. Si vous jouez une mélodie reggae sur un rythme de tango, on va d’abord dire que c’est du tango avec une mélodie reggae. Mais c’est le rythme toujours qui va prédominer pour dire « voilà, c’est cette musique-là ». Il y a le rock qui est défini par le fameux binaire qu’on connaît, la valse, le fameux trois temps qu’on connaît, etc. Le TAG, lui, c’est plus dans l’esprit. On est adeptes d’une philosophie qui est celle de l’ouverture sur les autres et du respect de soi-même. Donc, on peut très bien faire, comme je l’avais fait à un moment donné, un bal musette avec Yvette HORNER à l’accordéon, Mory KANTE à la kora et moi au luth arabe, jouer sur une même scène et jouer de la musique traditionnelle populaire française. Ça, c’était TAG aussi pour moi, c’est-à-dire à chaque fois cette idée de mélange.
Aujourd’hui, je me suis spécialisé dans ce qui m’intéresse le plus. C’est une énergie urbaine qui est très proche effectivement d’HENDRIX, du rock, parce qu’il y a quelque chose de contestataire et que les événements actuels dans le monde m’obligent à réagir ; et le rock me semble être un vecteur fédérateur et en même temps quelque chose que je ressens dans l’énergie qui est la meilleure réponse à donner. Des festivals comme Woodstock à une époque ont été vraiment présents par rapport à la guerre du Vietnam, et aussi bien le folk que le rock et le rythm and blues ont pu exprimer des idées qui étaient justement fédératrices pour la paix. Et j’ai envie humblement, moi aussi, de m’inscrire dans cet esprit. Les prochains albums que je ferai seront très proches de [Samarkand Hotel], mais cette fois avec mes compositions.
Il y a du reste déjà vos compositions sur [Samarkand Hotel].
MSK : Tout à fait.
Justement, à propos du TAG, pratiquement tout ce que vous avez fait peut se rattacher à ce qu’on peut appeler un mouvement.
MSK : Oui, c’est un mouvement, une philosophie.
Est-ce qu’il y a eu d’autres artistes qui se sont impliqués ?
MSK : Oui, tout à fait. En fait, le voyage est merveilleux pour ça parce qu’on découvre sa famille de cette façon et beaucoup de musiciens, pour définir leur musique actuellement, sont obligés de mettre cinq ou six mots. On a joué récemment avec un groupe qui s’appelle MASALA DOSA. Ils définissent ainsi leur musique : « dub, rock, indé… » ; on se retrouve avec cinq ou six mots à la suite. Je trouve qu’à un moment donné, un seul est plus simple. Bref, ils ont cette même démarche de mélanger des instruments traditionnels à l’électronique, et de les inscrire dans une musique qui est hors de la première création, dans une idée créatrice.
Donc, il y a l’idée du transfert d’un son dans une autre dimension.
MSK : Exactement. Dégager le sitar de la musique indienne pour, tout à coup, l’amener à l’intérieur du dub jamaïcain, ça c’est du TAG. Quand on prend un instrument indien comme le dilruba qui est un violon traditionnel et qu’on lui fait jouer du rock, c’est du TAG. Maintenant, si demain on prend un accordéon et qu’on veut lui faire jouer de la musique japonaise, je pense que ce sera du TAG aussi. Ce sont ces rencontres improbables qui existent, ces croisements inattendus, mais qui ont toujours le respect de l’instrument d’abord et du geste. Le TAG, au fond, c’est de la musique digitale au sens premier, celle des doigts. Et seulement après l’électronique.
Pour moi, les machines actuellement sont présentes dans nos vies. Et ça évolue toujours, mais c’est intéressant que vous puissiez dire « stop » et « on ». Il faut toujours avoir ce rapport à la machine. La machine doit être en résonance d’un esprit humain. Elle ne doit pas prendre le contrôle comme parfois, dans certaines musiques techno, on appuie un doigt sur le clavier et la machine fabrique tout elle-même. Je trouve qu’on perd une dimension initiatique de la musique, qui est quand même un parcours important, celui de ne pas savoir et d’apprendre, de découvrir et après d’enseigner. Le TAG s’inscrit dans cet esprit pour moi parce qu’il a justement cette dimension de dire « l’être humain d’abord, le geste traditionnel qui vient de centaines d’années d’expériences de musiciens d’abord, et seulement ensuite la machine connectée à cette expérience qui a des racines profondes. » C’est, enfin, donner des racines à l’électro, qu’elle n’a pas toujours. Il s’agit vraiment de conserver l’enseignement de ces maîtres musiciens.
La dimension du partage
Est-ce que, pour vous, l’échantillonnage s’inscrit dans cette philosophie ?
MSK : Il est un peu à l’inverse pour moi. Parce que souvent l’échantillonnage, c’est comme votre appareil actuellement : enregistrer un instant, un son, et ensuite le traduire systématiquement au sein de concerts ; mais on aura capté une atmosphère. C’est comme le collage dans l’expression photographique. Je n’ai rien contre. On peut faire des tableaux avec des collages de photos, mais ça reste du collage. On n’a plus cette dimension en 3D avec la spontanéité, avec l’inconnu. Parfois, quand je joue, comme dans toutes les musiques des années 1970 et comme dans toutes les musiques orientales, la dimension de l’improvisation est très importante. Et le respect de l’instant. On n’a plus cette dimension de l’improvisation quand on doit tout calibrer, tout caler dans un studio. Je trouve qu’on gagne peut-être en qualité froide de laboratoire, mais on perd beaucoup en émotion.
Justement par rapport à ça, quel regard avez-vous sur ce qu’il est convenu d’appeler maintenant « la world music » ? Est-ce que ce mouvement n’en souffre pas aussi ?
MSK : L’un des albums que j’ai écouté la première fois avec des samplings, certainement à l’origine de ce qu’on peut appeler « la base de la world music », c’était My Life in the Bush of Ghosts de Brian ENO et David BYRNE en 1980. J’étais très en colère parce que je croyais au départ que c’étaient des chanteuses libanaises qui étaient venues à Londres rencontrer Brian ENO et David BYRNE, et échanger avec eux. Et puis, un jour, j’ai appris qu’ils avaient pris simplement des disques qu’ils avaient enregistrés et mélangés et, en fait, ça m’a mis en colère.
Avec cette démarche, on perd cette rencontre, ce partage qu’il y a entre les êtres humains. C’est une dimension importante, le partage. La musique c’est ça, c’est une langue universelle qui doit être échangée.
Donc, c’est peut-être dur ce que je vais dire, pardon pour Brian ENO s’il lit, mais c’est réellement ce que je pense, c’était pour moi une sorte de prolongement de l’esprit colonial anglais qui, tout à coup, s’appropriait une culture mais la réinterprétait à sa manière, la dimensionnait à sa façon, sans laisser voix au chapitre aux gens dont il s’inspirait et sans les avertir.
Il y a après une dimension commerciale qui n’est pas non plus exempte. Mais, pour moi, c’est d’abord la première dimension de la non-rencontre. C’est un faux rendez-vous, c’est un mensonge. J’étais très en colère quand j’ai découvert ça. Le TAG était déjà dans ma tête depuis 1972. Ça m’est tout à coup apparu comme quelque chose qui était vraiment l’avenir de l’électro.
Depuis My Life in the Bush of Ghosts, les choses ne se sont pas vraiment arrangées non plus à ce niveau-là.
MSK : Non, j’ai découvert certains albums de Nusrat Fateh Ali KHAN qui étaient très pitoyables aussi, je trouve. Certains sont très, très beaux, mais Peter GABRIEL a quelquefois été aux limites. Certaines des expériences de Nusrat chez Peter GABRIEL ont été magnifiques et d’autres beaucoup plus contestables.
Mais je ne veux pas rester sur quelque chose de négatif. Pour moi, tant que la musique peut donner envie à des musiciens du monde, dans le sens noble du terme, de se rencontrer, alors elle a un intérêt. Mais est-ce qu’on se rencontre avec un sample ?
Pour en revenir à votre démarche concernant la distorsion, vous jouez du dilruba distordu. Alors pourquoi la voix n’est-elle pas distordue ?
MSK : La voix, elle est de toute façon acoustique. On a, et les imitateurs de par le monde en sont une preuve, une facilité à utiliser la voix de façon très différente selon les cultures. Quand on pense aux voix diphoniques qu’il y a en Asie, à la voix utilisée dans le théâtre Kabuki, à la voix de Nusrat qui est très distordue quand il monte dans les aigus. Je trouve que la voix se suffit à elle-même dans ses effets. On n’a pas besoin d’en rajouter.
C’est le seul instrument qui échappe au processus ?
MSK : Il n’est pas dit non plus que la voix ne passe pas par des effets, puisqu’elle partirait du même principe que de respecter un enseignement, une culture, une façon de chanter, et après serait filtrée par les différentes rencontres urbaines. Pourquoi pas…
Propos recueillis par Stéphane Fougère
au Festival Les Escales de Saint-Nazaire,
août 2006
Photos concert : Sylvie Hamon
Photo groupe Rahmann : livret CD Musea
Site : https://madsheerkhan.net/
Discographie MAD SHEER KHAN
Tabou (CD Maxi-single, Aladion, 1996)
Talisman (CD, TAG Records, 1996)
1001 Nights (CD, Erato-Detour, 1999)
Mahjuba (avec Marc DALL’ANESE) (CD, Origins, 2001)
[Samarkand Hôtel] (CD, Nomad Studio/Le Triton, 2002)
Samarkand Hotel Tour (CD mini-album promo – 1 titre inédit, autoproduction, 2003)
DemoNcrazy (CD, autoproduction, 2008)
Far Oued (CD, Nomad, 2012)
avec RAHMANN : Rahmann (LP, Polydor Records, 1980 – rééd. CD Musea, 1998)
(Article original publié dans
ETHNOTEMPOS n°31 – avril 2007
– discographie mise à jour en 2022)