Laurent SAIET and Guests – The Last Man Before Dawn

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Laurent SAIET and Guests – The Last Man Before Dawn
(trAce Label)

Il y a quelques années, nous avions déjà eu un aperçu de la qualité des œuvres paraissant sur ce label français fondé en 1994 par Laurent SAIET, Patrick MULLER et Guillaume LOIZILLON. Rappelons-nous de ces disques déroutants de groupes aux noms improbables comme PUPUSSE & PATRACK ou CHANTAL MORTE. Ils nous ont laissés des manifestes de blues rock urbain tortueux et torturés, poisseux et mortels, des oeuvres étranges et donc essentielles pour les amoureux d’aventures soniques ! Laurent SAIET a joué dans les groupes BEGIN SAYS, ZIG RAG ORCHESTRA dans les années 1980-1990 et il est aussi connu pour ses musiques de films (Frédéric COUSSEAU, Justine GASQUET). Il refait parler de lui aujourd’hui avec ce neuvième album paru le 19 juin dernier, The Last Man Before Dawn.

Avec sa pochette cartonnée en trois volets, aux références cinématographiques poussées, signée Thierry MULLER , nous somme assez vite happés par cette ambiance particulière de « soundtrack de fin des temps », où cette interaction entre les musiques et les nombreuses voix peut déconcerter même les auditeurs les plus endurcis. Ce disque veut mettre l’accent sur la collaboration entre SAIET et ses invités. Et ces derniers sont très nombreux ! Après avoir enregistré les bases musicales, il a souhaité appeler à la rescousse des chanteurs et chanteuses qui ont apporté leur contribution sur un ou plusieurs titres de leur choix (textes et mélodies vocales).

Nous retrouvons notamment Ben RITTER, Mika PUSSE, Théo HAKOLA ou Mélanie MENU pour le chant et des musiciens comme Quentin ROLLET (saxo), Paul PERCHERON (batterie) et Thierry MULLER (guitare). Laurent en tant que multi-instrumentiste joue de diverses choses que ce soit du mellotron, des claviers, de la guitare ou de la basse, en plus des percussions programmées et des sons électroniques.

Ce disque peut impressionner dès la première écoute. Nous remarquons la qualité des compositions, ses atmosphères sombres assez cold-wave, électro et progressives parfois. C’est un croisement entre différents genres que nous apprécions réellement.

Chaque titre dévoile un paysage sonore unique, décrivant un rock obscur, un brin free-jazz (les interventions du saxo), et où des boîtes à rythmes lancinantes côtoient des passages plus oniriques, des envolées de larmes et de fin des temps.

Les textes abordent des thèmes difficiles tels que l’aliénation, la solitude, le désespoir, la désillusion sans toutefois oublier un certain sens de l’humour comme nous aimons (le titre d’ouverture, Contortion). L’ombre de TUXEDOMOON surgit avec As Yelly Canny Eyes avec au chant Damien VAN LEDE. Gloomy & Sunday est un duo fabuleux entre Théo HAKOLA (sa voix rappelle celle de Nick CAVE à ses débuts) et Tatiana MLADENOVITCH. Under Cover avec Ben RITTER présente une intro où l’ambiance a un petit quelque chose qui renvoie à Iggy POP et David BOWIE (Nightclubbing).

Et puis, il y a des chansons assez renversantes, notamment celles avec Mika PUSSE, qui sortent vraiment du lot. Ocean est d’une beauté absolue : la voix apocalyptique de Mika, tel un prince des ténèbres submergé de désespoir, plonge le monde dans un état de mélancolie, doucement bercé par des cordes aériennes et soyeuses. Musicalement, c’est une merveille aux orchestrations progressives divines qui vous brise le cœur en mille morceaux.

Blinding Guru est un autre moment fort où la tension est palpable à travers cette basse répétitive et où les chœurs, teintés d’imageries christiques vengeresses, nous ramènent aux ambiances de POPOL VUH (Aguirre). Far Away diffuse des couleurs dark, avec en plus un saxo lancinant, vénéneux, une batterie implacable et une basse mystérieuse.

Et n’oublions pas cette chanson intitulée Far from the Sun, chantée par une certaine Mélanie MENU, dont la voix unique (héritière lointaine d’une Lydia LUNCH et d’une NICO) est un pur trésor de sensualités, de menaces, de tendresse et de chaleur. Mélanie est la vision d’un ange qui restera gravée à tout jamais dans nos cœurs.

Ce disque pourrait être un chant d’amour et d’agonie, une œuvre d’art sonore et visuelle d’une tristesse insondable, secrète et flamboyante par ses thèmes abordés (reflets d’un monde en perdition), les différentes voix, l’esthétisme sonore, la poésie ambiante, le visuel (les collages de la pochette: le cinéma d’antan, romantique et glamour à l’ère atomique), et cette féminité représentée par les photos de pin-up, les voix des chanteuses et aussi les cordes apportant de la douceur, de la lumière, un certain espoir et une pluie de larmes lavant nos chagrins… Nous sommes ainsi sauvés !

Cédrick Pesqué

Site : https://tracelab.com/catalogue/

Page : https://tracelabel.bandcamp.com/

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