ALAMAAILMAN VASARAT – Käärmelautakunta

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ALAMAAILMAN VASARAT – Käärmelautakunta
(Silence. / Wolfgang Records)

Avec leur premier opus, Vasaraasia, les « Marteaux de l’Enfer » avaient prouvé qu’ils n’avaient pas choisi leur nom au hasard et l’avaient encore moins volé ! Mais quand on a, effectivement, frappé démoniaquement fort, on a toutes les chances d’être attendu au tournant du deuxième album. Fatalement, il suffit qu’on s’attende à être sonné pour que le choc soit en fin de compte moins dur. Et c’est un peu ce qui se passe avec Käärmelautakunta. La recette d’ALAMAAILMAN VASARAT est désormais assimilée, digérée et ne crée plus la surprise. Cependant, la délectation est toujours au rendez-vous ! Dans Vasaarasia, ALAMAAILMAN VASARAT tenait à peu près ce langage : « Donne-moi ton kebab ou crève » (traduction de Kebab Tai Henki !). Avec Käärmelautakunta, il semble plutôt nous dire : « Goûte mon trash-kebab comme il est bon ! »

Tant pis donc si vous attendiez de la part des Finnois une reconversion à l’électro country gothique (ce gag reste encore à inventer…), ALAMMAAILMAN VASARAT continue à punk-klezmériser et à métallo-balkaniser tout aussi rageusement et peaufine ainsi son style à priori inenvisageable. Comment se douter en effet qu’une formation de base aussi acoustique, avec saxophones soprano et ténor, trombone, clarinette basse, tuba, trompette, orgue à pompe, grand piano, batterie et deux violoncelles puisse à ce point rendre un son aussi hargneux et râpeux ? Comme si THE EX rencontrait Boban MARKOVIC et Emir KUSTURICA, ou bien METALLICA et KING CRIMSON avaient donné rencard au TARAF DE HAIDOUKS ou bien John ZORN déblatérait sans fin avec Lars HOLLMER…

En bref, si vous avez savouré la sauce de Vasaraasia, vous en reprendrez certainement bien une louche avec Käärmelautakunta ; le produit est garanti maison, avec service de qualité, cuisson à point, sauce relevée et « pimentation » de rigueur, le tout s’étant bonifié depuis l’ouverture de la maison.

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Même la pochette s’inscrit dans l’esthétique de celle de l’album précédent, avec ces photos de paysages urbains (des immeubles) passablement jaunies et usées par des gouttes d’acide tombées maladroitement dessus.

C’est toujours à une sorte d’apocalypse bariolée et tonitruante que nous invite ALAMAAILMAN VASARAT. Il semble toutefois que le groupe ait privilégier des rythmiques plus lentes et pesantes, tendance processions funèbres et marches solennelles mêlant amertume et rage intérieure (Kivitetty Saatana, Olisimme Uineet Vieläkin Pidemmälle et Jââ, Hyvâ Mieli en sont des exemples éloquents). Astiatehdas et Lentävä Mato renouent pour leur part avec l’alacrité d’un Mamelukki & Musta Leski.

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Sinon, le ton est à la mélancolie vigoureuse, à la douleur joviale, à l’enthousiasme aigri et à la fête grinçante, grâce à ces envolées de cuivres, ces sombres bourdons d’orgue et à ces riffs âpres et distordus de violoncelles.

On en redemandait, il ne nous reste plus qu’à nous régaler une fois de plus !

Stéphane Fougère

PS : Le fondateur du groupe ALAMAAILMAN VASARAT, Jarno SARKULA, aussi connu sous le nom STAKULA, est mort le 12 juillet 2020 à l’âge de 47 ans seulement.

(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°13 – juin 2003, et mise à jour en 2020)

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