HADOUK TRIO – En concert au Satellit’Café

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HADOUK TRIO – En concert au Satellit’Café  (DVD)
(Naïve)

En 2004, le trio formé de Didier MALHERBE, Loy ERHLICH et Steve SHEHAN peut se targuer d’avoir accédé à une forme de consécration tant artistique que médiatique. Preuve en est qu’après seulement deux albums studio (trois si l’on compte l’album Hadouk, crédité à l’époque aux seuls MALHERBE et EHRLICH, SHEHAN n’étant pas encore de la partie), le HADOUK TRIO voit sa carrière discographique embellie d’un magnifique double album en concert (Live à FIP) et, au cas où ça ne suffirait pas, de ce DVD – le premier de sa carrière – qui permet de le retrouver sur scène dans cette salle parisienne bien connue des amateurs de musiques du monde, le Satellit’Café.

On a dû vous seriner maintes fois que le terme « hadouk » est une contraction des termes « hajouj » et « doudouk », lesquels sont des instruments provenant de terres et de traditions éloignées de l’hexagone, le premier étant une sorte de basse utilisée par les Gnawas marocains, et le second un ancêtre arménien du hautbois. Ce hajouj, ce doudouk, tout extra-terrestres qu’ils vous paraissaient être, se révèlent désormais au grand jour dans les images de ce DVD, aux côtés d’autres étrangetés instrumentales comme la kora et la sanza de Loy EHRLICH, la bansuri et l’ocarina de Didier MALHERBE, sans parler des archets atmosphériques et des percussions foisonnantes de Steve SHEHAN, dont les dénominations sont de vrais poèmes : surdo, darbouka, shekéré, hadgini, congas, ringsik, djembé, cloche tibétaine, ocean drum…

Les spécificités timbrales de toutes ces peaux, cordes et bois confèrent au HADOUK TRIO sa personnalité sonore unique, sans oublier les plus usuels – mais tout aussi buissonniers dans leurs phrasés – saxophones soprano et sopranino, clarinette alto du pixie « Bloomdido », et les claviers de Loy.

Le décor nocturne et galactique du Satellit’Café, antre de prédilection du trio planqué quelque part dans le 11e arrondissement de Paris, contribue à plonger derechef l’auditeur-spectateur dans l’univers « hadoukien », véritable satellite de la planète verte, où l’on ne sera pas étonné de croiser une divinité indienne aux ondulations langoureuses, des comédiens simiesques hypnotiseurs, dont un gibbon fort en acrobaties linguistiques, un dragon lunaire, ou encore quelque créature « shamanimalesque » qui « voit le temps comme un tableau ». Sûr que ça change des éléphants roses contrefaits…

Ce concert a été enregistré cinq jours après celui de la station de radio FIP. A priori, on pourrait craindre une certaine redondance dans le répertoire entre les deux concerts, mais pas tant que ça. Certains morceaux qui n’ont pas été joués lors du concert à FIP l’ont été au Satellit’Café, comme Le Théâtre des Singes, Polar Bear, Le Gibbon et Échappade, ce qui rend l’acquisition de l’un et de l’autre indispensable pour les fins gourmets du HADOUK TRIO.

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De prime abord, le DVD ne paye pourtant pas de mine : un seul disque (mais le concert est complet, comme le précise un macaron sur la pochette), un menu euh… sobre, seulement deux caméras pour filmer, l’image est vaguement granuleuse, pas de bonus avec scènes coupées, bandes-annonces, jeux vidéo, ou de making-of où on vous dit que tout le monde est content d’avoir travaillé avec tout le monde qui est beau et qui est gentil et que l’on remercie, pas non plus de lien vers un site où il y a des porte-clés en aluminium fluo à gagner. Ici, il n’y a qu’un concert restitué en intégralité en dépit des fondus au noir à la fin de chaque morceau. Et vous savez quoi ? C’est parfait comme ça !

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Les caméras suivent avec attention les moindres faits et gestes des musiciens, qu’il nous est parfois permis de regarder de très près grâce à un montage qui use occasionnellement du double fenêtrage (luxe suprême !). Dans le menu, chaque musicien a droit à sa page de présentation sur laquelle sont listés les instruments dont il joue. Un clic sur un instrument renvoie à une séquence du concert où cet instrument est joué. Pas de bla-blas, pas de falbalas, pas d’encyclopédies, de biographies ni de chi-chis.

Il ne reste plus qu’à embarquer dans le trip du HADOUK TRIO, sans attacher sa ceinture de préférence, de manière à mieux se laisser porter par les grooves cristallins, le swing céleste et les timbres végétalisés de ces trois globe-trotters qui, après une dizaine d’années de concerts, confirment leur goût pour l’échappade onirique animée par une pulsation jazz et dont les développements sont fortement assaisonnés de saveurs ethniques, notamment africaines et asiatiques.

Stéphane Fougère

(Chronique originale publiée dans
TRAVERSES n°18 – juillet 2005, et remaniée en 2022)

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