NOSTOC – Les Enfers tranquilles

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NOSTOC – Les Enfers tranquilles
(Autoproduction / TroisQuatre!)

nostoc-les-enfers-tranquillesVous vous souvenez sûrement du précédent voyage (celui de la poussière au paradis) auquel NOSTOC, le « crachat de lune » aquitain, nous avait convié en 2010 ? Après cette escapade dans les contrées célestes, notre trio poly-instrumentiste effectue désormais le voyage-retour, redescendant cette fois plus bas que Terre, dans… Les Enfers tranquilles !

Le titre délicieusement énigmatique et malicieusement ambigu de ce troisième album suscitera indubitablement la circonspection un rien curieuse de l’auditeur, lequel a intérêt à se débarrasser de ses présupposés… Mais pour quiconque a déjà connu le paradis de la poussière, la sérénité supposée des territoires chtoniens ne sera pas un aberrant mirage. La peinture d’Ana YAMANJA qui illustre la pochette en donne un brillant aperçu, assurément vibratoire.

Qu’on se rassure donc, NOSTOC reste NOSTOC et enfonce même le clou de son invite à un périple transfrontalier dans lequel s’esbaudissent un khêne, une clarinette, un didgeridoo, des saxophones, des percussions d’un peu partout et des voix décidément déconcertantes.

Si la musique traditionnelle d’Asie du Sud-Est alimente effectivement le morceau d’ouverture, justement nommé Laotien, de par la mise en évidence du khêne, on y décèle aussi un goût pour des tempi complexes générateurs de transe. Dans La Latitude des chevaux, on croise des rythmes moyen-orientaux avec le ronflement d’un instrument aborigène et les variations en spirale d’un saxophone. Et quand le didgeridoo serpente avec finesse dans le lit d’un ruisseau, il peut très vite y faire des vagues, secoué par les frappes sèches d’un tombak et agité de soubresauts saxophoniques (Serpent d’eau).

Comme à son habitude, NOSTOC brouille savamment et élégamment les repères culturels et géographiques et concentre sa démarche sur la suggestion et l’expression de transports extatiques, arrosant ses compositions de tourneries soufflées brinquebalantes et effervescentes entre la clarinette et le khêne (Sans les doigts), ou entre le khêne et le saxophone alto ou ténor (Petite Étoile, Enola), et toujours en convoquant des rythmes tortueux sur des peaux d’ailleurs (tombak, udu, daf, etc.).

Quant aux chants d’Emmanuel COMMENGES ou de Guillaume DUPUY, ils se veulent résolument insituables, voire insaisissables, diffusant par interstices des échos de traditions vocales immémoriales qui auraient subi quelques bifurcations peu orthodoxes, mais toujours dans la perspective qu’elles distillent des influx extatiques. Il n’est que de suivre leurs emballements sinueux et progressifs dans Thali ou dans Capteurs.

Si l’on était tenté de définir le son de NOSTOC comme étant celui d’une musique de chambre jazzy et exotique, il ne faudrait pas en déduire trop vite qu’elle se confond avec de la musique d’ascenseur ou de salle d’attente. Sous ses apparences douceâtres et rêveuses, la musique de NOSTOC sait également, au détour d’une ébullition, s’emballer et sortir les crocs. Tout en restant acoustique, elle révèle des inflexions plus anguleuses, voire plus rock, comme dans Capteurs et Rêve d’équerre, et plus encore dans Liv, qui bénéficie il est vrai de la puissance vocale incantatoire et imprévisible de Beñat ACHIARY, excusez du peu !

Que l’auditeur n’attende donc aucun compromis de la part de NOSTOC. De compositions minutieusement rustiques en improvisations finement affolées, le groupe ne cesse de déployer toutes les variantes de son rare univers sensible, qu’il soit paradisiaque ou infernal. Nul ne sera besoin pour l’auditeur de passer un pacte avec le diable pour goûter les effluves de ces Enfers tranquilles…

Sites : http://nostoc.bandcamp.com/releases

Stéphane Fougère

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