CATALOGUE – Assassins
(FOU Records)
Ça vous gonfle, les pochettes arty et les livrets bourrés de textes et de photos ? Vous n’aurez pas ce genre de désagrément avec ce digipack, dont les deux volets intérieurs sont noirs, point barre. Sur le recto, Assassins, CATALOGUE, comme taillé au burin sur une surface raturée. Au verso : Jac BERROCAL, J.F. PAUVROS, G. ARTMAN ; enregistré et produit par Jean-Marc FOUSSAT, pareillement buriné, et basta ! Mais à quoi bon en savoir davantage ? Les noms des « usual suspects » devraient suffire à attirer le regard et à attiser l’oreille. « Bon sang, mais c’est CATALOGUE ! Avec « LE » BERROCAL, « LE » PAUVROS et « L’ » ARTMAN ! » Oui, c’est ce que je viens d’écrire. Faut suivre, un peu.
Live at Antwerpen, Penetration (Khomeiny Twist, etc.), Insomnie, Brussell Live… Sûr que ça remonte à… Oui, et c’est justement pour éviter d’agiter la balise temporelle dans le sens de la nostalgie et du passéisme qu’aucune autre information n’a été inscrite sur ce digipack. Car CATALOGUE, souvenez-vous en, a toujours revendiqué de jouer une musique d’aujourd’hui, une musique de l’instant. Une mèche, et c’est parti ! L’art de foutre le feu n’a besoin de rien d’autre, et surtout pas de s’étaler.
Et en l’occurrence, 21 minutes et une poignée de secondes suffisent. Au diable, les remplissages poussifs à 79’58 ! Des maisons ont brûlé en moins que ça, les cerveaux peuvent bien cramer aussi vite. Alors à quoi bon savoir quand et où ? Ce CD, tu l’écoutes aujourd’hui, c’est une musique d’aujourd’hui. Tu l’as écouté hier ? Tu croiras l’avoir écouté aujourd’hui. Tu l’écouteras demain ? T’auras l’impression d’être aujourd’hui. Pratique pour pas vieillir.
Et un brûlot, ça ne vieillit pas. Ça passe, le temps que ça décape. Ou que ça détartre.
Oh ! Bien sûr, on pourra toujours regretter de ne pas avoir été sur place ! Mais que faire à la place ? Alors voilà, y a Assassins, une déflagration gravée en trois actes, mais d’une traite.
Du bruit. Blanc. Noir. Du bruit plein, mais pas complètement. Il y a aussi des soupapes de sécurité, juste le temps de préparer le cocktail molotov suivant. Mot d’ordre : désordre !
Avec quoi ? Comme d’hab’ : une guitare tronçonneuse, bulldozéreuse, une batterie poinçonneuse, moissonneuse, une trompette absentée mais une voix assassineuse, filtreuse, échoïneuse, distortionéisée. Un trio satureux et sulfurant, fulguratif et incandescendant, au service d’un flux déconstructeur, capharnaümiste, dérapeur et larseniste.
Ça vous paraît étouffant ? Au contraire, ça vibre, ça palpite, certes de travers et à côté, et ça respire à grand bruit, et occasionnellement à grand silence, subrepticement.
Dynamiter les formes, brûler les lignes, telles sont les conditions non négociables pour remettre de la vie dans ce foutu couloir de la mort. CATALOGUE s’y est employé, il s’y emploie ici et maintenant. Un « killer trio » pour décimer, éradiquer, atomiser les Assassins de tous bords. Sauvagement vital.
Stéphane Fougère